REVUE DES MEDIAS AUDIOVISUELS DU 30 MARS 2011

30 mar 2011

REVUE DES MEDIAS AUDIOVISUELS DU 30 MARS 2011

RFI - Edition de 6 heures 30

█ Les forces armées pro-Ouattara sont désormais à 200 km seulement d'Abidjan. Au deuxième jour de leur vaste offensive, elles ont pris hier le contrôle de plusieurs villes importantes.

Boniface Vignon : Le camp Ouattara aurait-il changé de stratégie en privilégiant la force pour en finir avec la crise postélectorale ? En tout cas, c'est la première fois qu'il affiche clairement cette option militaire. Car depuis hier, des combattants pro-Ouattara ont pris le contrôle d'Abengourou, située à seulement 220 km au nord-Est d'Abidjan. Cette ville, vous le savez, est la capitale économique et le cœur du pouvoir du régime Gbagbo. Un succès militaire qui s'ajoute à d'autres, à Bondoukou, Daloa et Duékoué. Acculé sur le plan militaire, isolé diplomatiquement et de plus en plus asphyxié économiquement, le camp Gbagbo demande en urgence un cessez-le-feu immédiat. Et l'ouverture d'un dialogue sous la médiation du Haut Représentant de l'Union africaine. Selon Ahoua Don Mello, le porte-parole du gouvernement, le Président Gbagbo a reçu un courrier de l'Union africaine l'invitant à une négociation du 04 au 06 avril prochain à Addis-Abeba. On n'a pas encore répondu, mais il n'y a pas de raison de refuser une occasion de dialoguer, assure Ahoua Don Mello. Réponse sans détour des alliés d'Alassane Ouattara : toutes les voies pacifiques pour amener Laurent Gbagbo à reconnaître sa défaite sont désormais épuisées.

█ Depuis deux jours, l'offensif pro-Ouattara a donc permis la conquête de plusieurs villes. Certaines sans qu'un coup de feu soit tiré, d'autres au terme d'un combat. C'est le cas par exemple à Duékoué où s'est rendu notre envoyé spécial.

Zoum Dosso : Des maisons en flamme, des traces d'obus et de canons sur les murs. Duékoué porte les traces très fraîches des violents combats qui ont eu lieu entre les forces fidèles à Alassane Ouattara et les forces loyales à son rival Laurent Gbagbo. Le commandant Losseni Fofana des forces nouvelles et ses éléments contrôlent la ville depuis mardi matin. C'était des combats aux armes lourdes. Les armes légères n'avaient pas leur place ici, les femmes non plus. Il fallait être un vrai homme pour combattre à Duékoué, explique un lieutenant du commandant Fofana. Le doigt sur la gâchette, très attentif aux moindres bruits, des centaines de soldats des forces nouvelles patrouillent la ville. Les quelques civils qui n'ont pas pu sortir de la ville pendant les combats sortent de leur cachette. Deux pick-up ayant à bord des mitrailleuses AK canon veillent aux grains à la rentrée et à la sortie de la ville. Zoum Dosso, Duékoué RFI.

█ En Côte d'Ivoire, les événements se précipitent. Les forces armées d'Alassane Ouattara attaquent sur tous les fronts. De l'aveu du porte-parole de Laurent Gbagbo, les forces armées de celui-ci opèrent un repli et son camp appelle au dialogue et à cessez-le-feu. Le diplomate français Michel De Bonnecorse fut pendant cinq ans conseiller Afrique du Président Chirac. Il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Michel De Bonnecorse bonjour.

Michel De Bonnecorse : Bonjour.

RFI : Attaque simultanée sur trois fronts. Est-ce que cette offensive peut aller jusqu'à Abidjan ?

Michel De Bonnecorse : Je pense que la percée vers Abidjan se fera relativement aisément. Il y a quand même une grande désorganisation dans les forces qui soutiennent M. Gbagbo. Donc je ne pense pas qu'ils soient en mesure d'opposer beaucoup de résistances. Le problème n'est pas d'aller jusqu'à Abidjan. Le problème ensuite est de se poser la question des conséquences d'une éventuelle entrée dans Abidjan. Beaucoup de quartiers sont ethniquement distincts. Une entrée dans ces quartiers populaires, d'abord, se prête à beaucoup de pièges et d'embuscades. Ensuite elle peut très vite déclencher une vraie guerre civile.

RFI : L'ONUCI se dit très préoccupée par l'utilisation d'armes lourdes, notamment des lances roquettes et du mortier par le camp de Laurent Gbagbo contre les populations civiles d'Abidjan.

Michel De Bonnecorse : Oui. Deux ou trois observations. Premièrement, ça rappelle beaucoup la méthode du colonel Kadhafi contre sa population. Deuxièmement, c'est un peu une obsession chez Laurent Gbagbo. Je n'oublie pas qu'au début des événements, il y a exactement huit ans et demi, lorsque les forces nouvelles se sont emparées de Bouaké. Laurent Gbagbo a demandé au Président Chirac que les hélicoptères armés françaises tirent aux roquettes sur les quartiers populaires de Bouaké où les rebelles avaient pris position. Evidemment, M. Chirac a dit non. Et d'ailleurs, c'est le début d'une grande méfiance qui s'est instaurée entre les deux hommes.

RFI : Donc vous craignez des exactions contre les populations civiles ?

Michel De Bonnecorse : Oui. J'ai quand même quelques bémols qui atténuent mon inquiétude. C'est que tout s'effiloche autour de Laurent Gbagbo. Des militaires se rendent. C'est-à-dire qu'ils se rendent aux forces nouvelles. Ça on ne le sait pas mais ça existe y compris dans Abidjan. Il y a des pays qui apparaissaient comme soutien qui sont en train de le lâcher. Ces pays le lui ont clairement dit. Je pense à deux pays importants, l'Afrique du sud et l'Angola.

RFI : Mais est-ce que l'Angola ne soutient pas encore militairement Laurent Gbagbo justement ?

Michel De Bonnecorse : Plus maintenant.

RFI : Vous avez des informations.

Michel De Bonnecorse : Oui. Plus maintenant.

RFI : Précises dans ce sens ?

Michel De Bonnecorse : Oui. Exactement.

RFI : Et les mercenaires libériens. Est-ce qu'ils ne peuvent pas permettre un sursaut du camp de Laurent Gbagbo ?

Michel De Bonnecorse : Les mercenaires, c'est très utile. Mais le moral des mercenaires fluctue en fonction des capacités financières des commanditaires. Or le commanditaire n'a plus d'argent.

RFI : Mais en tant qu'ancien conseiller de Jacques Chirac. Est-ce que vous n'êtes pas un peu partisan ? Et est ce que vous ne prenez pas vos désirs pour des réalités ?

Michel De Bonnecorse : Ecoutez, c'est vrai qu'on n'oublie pas qu'il a fait tuer des journalistes français, fait tuer neuf militaires français délibérément à Bouaké. Je dirais qu'il y a un avant et un après Bouaké. Mais ce n'est pas un réflexe du Chiraquisme, si je puis dire. Puisque je note que le Président de la République Nicolas Sarkozy est sur la même ligne et même une ligne plus dure que celle de Jacques Chirac.

RFI : En 2002, lors d'une première offensive des forces nouvelles sur Abidjan, la France avait stoppé l'avancée des rebelles au sud de Bouaké. Pourquoi ne fait-elle rien aujourd'hui ?

Michel De Bonnecorse : Alors, je rappelle qu'en ce moment là, Laurent Gbagbo était Président légitime. Maintenant, la situation est totalement différente. Puisque le Président, c'est Alassane Ouattara. Et Laurent Gbagbo est illégitime et c'est à mauvais droit qu'il reste dans le palais présidentiel.

RFI : Alors si les choses évoluent très vite sur le plan militaire, et si les forces d'Alassane Ouattara vont vers la capitale, est ce que vous ne craignez pas des représailles contre la population civile ?

Michel De Bonnecorse : C'est un risque à craindre. Mais en même temps, il me vient des tas de signaux des ivoiriens de la capitale. Ils en ont assez. Ils feront tout pour éviter des clashes ethniques. Le danger existe parce que c'est quand même un tas de brindilles sèches et une petite allumette peut tout enflammer. Mais je crois que la population est beaucoup plus sage que le clan de Laurent Gbagbo.

RFI : Michel De Bonnecorse Merci.

RFI - Edition de 7 heures 30

█ Signe de l'extrême tension qui domine à Abidjan, l'ONUCI, la mission de l'ONU dans ce pays, accuse les forces pro-Gbagbo d'avoir tiré sur des civils à Williamsville à Abidjan faisant une dizaine de morts.
Et elle accuse les pro-Ouattara d'avoir ouvert le feu sur l'un de ses hélicoptères au dessus de Duékoué.

█ La situation en Côte d'Ivoire, Barack Obama, le Président américain, l'a évoqué hier dans un entretien à la télévision. Sur la chaine NBC, il a accusé Laurent Gbagbo, je le cite, « de se servir de voyous pour se maintenir indûment au pouvoir. » En ce qui concerne une possible option militaire pour déloger du pouvoir Laurent Gbagbo, elle ne semble pas à l'ordre du jour. Nous avons beaucoup d'autres ressources à notre disposition, a notamment déclaré Barack Obama.

REVUE DES MEDIAS AUDIOVISUELS DU 29 MARS 2011

BBC - Edition de 18 heures 00

█ Un hélicoptère de la mission de l'ONU en Côte d'Ivoire, l'ONUCI, a essuyé des tirs des forces nouvelles. Là-dessus, sur cet incident, on écoute le porte-parole de l'ONUCI Hamadoun Touré, interrogé par Vénuste Nshimiyimana.

Hamadoun Touré : Il s'agit d'un hélicoptère qui transportait des collègues de l'ONUCI qui faisaient une mission de reconnaissance autour de Duékoué où il y avait des combats, comme vous le savez. Il s'agissait d'évaluer la situation de manière à pouvoir aider les populations qui sont les plus touchées lorsqu'il y a ce genre de combat. Au moment où nous tentions l'approche d'atterrissage, l'hélicoptère a essuyé des tirs. Et les tirs étaient en provenance des éléments des forces républicaines.

BBC : Justement nous essayons de comprendre comment les forces républicaines et pro-Ouattara ont pu tirer sur un hélicoptère des Nations Unies ?

Hamadoun Touré : Lorsque nous les avons contactés, ils nous ont dit qu'ils pensaient que c'était des FDS, c'est-à-dire les forces de défense et de sécurité loyales au Président Gbagbo qui avaient peint un hélicoptère en blanc pour venir les attaquer.

BBC : Avant le décollage de l'hélicoptère, vous auriez dû naturellement annoncer votre arrivée à Duékoué.

Hamadoun Touré : Ecoutez. Nous allons où nous voulons conformément aux règles qui nous établissent ici. Ce que nous appelons l'accord de siège. Nous avons une liberté totale de mouvement. Et lorsque nous volons, bien sûr, les tours de contrôle compétentes sont informées. Nous ne volons pas au hasard et nous avons également des éléments au sol.

BBC : M. Hamadoun Touré, il me plaît de vous entendre dire que vous volez, partout où vous voulez selon votre mandat. Quand allez-vous voler au secours de ces populations déplacées dans pratiquement toute la Côte d' Ivoire. Mais aussi de ceux-là qui se font tirer dessus tous les jours ?

Hamadoun Touré : Alors au moment où je vous parle, il me plaît de vous annoncer que nous avons déployé nos troupes autour de l'église catholique de Duékoué où des milliers de personnes ont trouvé refuge. Et les prêtres qui gèrent l'église nous ont fait appel et nous sommes là. Nous avons également continué nos patrouilles aussi bien terrestres qu'aériennes pour contribuer à la protection des populations. Votre question me permet de rappeler que la protection des populations ou voler au secours des populations, comme vous dites si bien, est la première responsabilité des dirigeants ivoiriens.

BBC : Mais quand les deux parties en conflit ne savent pas protéger ces populations. Il vous incombe à vous aujourd'hui, messieurs des Nations Unies, soldats de la paix de les protéger. Et cela fait partie de votre mandat. N'est ce pas ?

Hamadoun Touré : Mais nous faisons ce qui fait partie de notre mandat. Mais nous rappelons aussi aux autres ce qui fait partie de leur mandat. C'est restaurer la paix dans leur pays, c'est protéger la population qu'ils sont supposés diriger. C'est également faire le travail avec nous.

Le porte-parole de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire, Hamadoun Touré qui répondait aux questions de Vénuste Nshimiyimana.