Revue de presse internationale du 21 décembre 2010

21 déc 2010

Revue de presse internationale du 21 décembre 2010


Côte d'Ivoire: le camp Ouattara appelle "à la désobéissance" à Gbagbo, AFP, 21 décembre 2010- Guillaume Soro, Premier ministre du gouvernement d'Alassane Ouattara, un des deux président proclamés de Côte d'Ivoire, a appelé mardi les Ivoiriens à "la désobéissance au gouvernement factice" de son rival Laurent Gbagbo "jusqu'à son départ". "Je vous exhorte dès cet instant à la désobéissance au gouvernement factice de Laurent Gbagbo jusqu'à son départ", indique M. Soro dans un communiqué. Il leur demande également, "dans les campements, villages et villes, de s'organiser, de se mobiliser et de manifester par tous les moyens jusqu'au départ de Laurent Gbagbo du pouvoir". Selon lui, "la Côte d'Ivoire connaît, en ce moment même, les heures parmi les plus sombres de son histoire. Notre pays vit la pire des escalades dans la barbarie d'un clan, d'un régime fini, contre les populations civiles démunies et désarmées". Depuis l'échec jeudi d'une marche des partisans de M. Ouattara contre la télévision d'Etat tenue par les pro-Gbagbo, réprimée par les forces de l'ordre qui lui sont restées fidèles, "nous dénombrons près de 200 morts et 1.000 personnes blessées par balles", affirme le communiqué. Le texte évoque en outre "environ 40 disparus et près de 732 arrestations". "Plus grave, des femmes sont battues, déshabillées, violentées et violées.(...) Les ingrédients pour un génocide sont en place", affirme-t-il.

Sommet extraordinaire de la CEDEAO sur la Côte d'Ivoire vendredi à Abuja, AFP, 21 décembre 2010- La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a annoncé mardi la tenue vendredi à Abuja d'un sommet extraordinaire sur la Côte d'Ivoire, après avoir déjà suspendu le pays de ses rangs et demandé au président sortant Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir. Les pays de la Cédéao "souhaitent examiner les derniers développements en Côte d'Ivoire et voir comment nous pouvons y apporter une réponse collective", a déclaré Sunny Ugoh, porte-parole de l'organisation qui regroupe 15 pays.
La France "extrêmement respectueuse" de la souveraineté du peuple ivoirien, AFP, 21 décembre 2010- Le porte-parole du gouvernement, François Baroin, a affirmé mardi que "c'est le peuple souverain ivoirien lui-même qui a
décidé de sortir Gbagbo", soulignant que la France était "extrêmement
respectueuse" de cette souveraineté et "des décisions internationales" en Côte
d'Ivoire. "En trois semaines, il me semble que la diplomatie française et le
président de la République ont été extrêmement respectueux de l'évolution, des
décisions sur le plan international" en Côte d'Ivoire, a déclaré François
Baroin sur RTL. Nicolas Sarkozy a été vivement critiqué par les partisans de Laurent Gbagbo pour avoir lancé vendredi dernier un ultimatum au président ivoirien
autoproclamé (...). Les électeurs "ont désigné M. (Alassane) Ouattara comme président de la Côte d'Ivoire (...) C'est le peuple souverain ivoirien qui a choisi de sortir Gbagbo, il doit d'abord non pas entendre le message de Paris, de Washington,
du monde entier, il doit entendre le message des Ivoiriens", a-t-il ajouté (...)

Côte d'Ivoire : Dominique de Villepin ne croit pas à la « logique de l'ultimatum », Fasozine, 20 décembre 2010- Dominique de Villepin ne croit pas à la logique de l'ultimatum pour mettre fin à la crise politique en Côte d'Ivoire. Pour l'ancien Premier ministre français, qui s'exprimait ce lundi 20 décembre 2010 sur une radio française, il faut plutôt envoyer sur place un représentant capable de mener une négociation. «L'Union africaine a envoyé un médiateur, Thabo Mbeki, l'ancien président sud-africain, il faut que la communauté internationale à travers les Nations unies, il faut que la France, avec l'Europe, envoient sur place un représentant capable de mener une négociation», a-t-il estimé.
Dominique de Villepin occupait le poste de ministre des Affaires étrangères de la France lors de la signature des accords de Marcoussis en janvier 2003 entre le président Laurent Gbagbo et l'opposition conduite par Alassane Ouattara. «J'ai conduit cette négociation en 2003 de façon réussie puisque nous avons, sans trop d'encombres, évité la guerre civile, il faut reproduire le même type de négociation», a-t-il ajouté, souhaitant «une solution où le président élu Alassane Ouattara puisse prendre le pouvoir tout en laissant une place à l'opposition».
La réaction de Dominique de Villepin (dont Laurent Gbagbo se vante d'avoir fait nommer Premier ministre en 2005, selon un télégramme confidentiel américain révélé par WikiLeaks) survient après celle de Marine le Pen, la vice-présidente du Front national, qui a regretté dimanche «la précipitation avec laquelle le président de la République a pris position», sur la crise en Côte d'Ivoire. «Nous avons 15.000 expatriés qui sont en Côte d'Ivoire et 900 soldats, il m'apparaît dangereux d'avoir ainsi pris assez brutalement cette position», a-t-elle ajouté.
La Fédération internationale de la Ligue des droits de l'homme (FIDH) condamne les violations graves des droits de l'Homme qui endeuillent la Côte d'Ivoire depuis la tenue de l'élection présidentielle ainsi que les propos tenus ces dernier jours par Laurent Gbagbo et quelques uns de ses proches qui sont de nature à intensifier la crise politique et pousser le pays dans un nouveau conflit interne, indique un communiqué de l'organisation transmis jeudi à APA à Abidjan (...)

Les attaques quotidiennes de la presse et de la télévision ivoirienne inquiètent les plus blasés, Le Figaro, 21 décembre 2010- (...) Comme ses compatriotes d'Abidjan, Jean-Luc pense, sans trop l'avouer, à ce mois de novembre 2004 durant lequel des manifestations antifrançaises ont poussé près de 7000 ressortissants à évacuer le pays sous protection de l'armée. «Cette fois la situation est différente. Il y a une opposition politique entre deux partis. Les Français ne sont pas en première ligne», insiste-t-il. Pour autant, Jean-Luc prend des précautions. «Je minimise mes déplacements.» Il passe juste de son usine de congélation de poissons à son quartier, Port-Bouët, où il se dit tranquille. «Ici je suis connu et je ne risque rien. Moi, de toute façon, je ne partirai jamais. Mais je conseille à tous les vrais Français de rester sagement chez eux». Car des Français comme lui, revenus de tout et «tropicalisés» jusqu'au fond de leur âme, le pays n'en compte plus guère. Beaucoup, comme Alice, sont des nouveaux venus qui ne cachent pas leur étonnement. Les attaques quotidiennes de la presse et de la télévision contre le France, accusée de vouloir organiser un génocide en Côte d'Ivoire, la glacent. La jeune femme, qui tient «par précaution» à rester anonyme, vit depuis deux semaines cloîtrée dans sa villa. «Je suis très inquiète. On a l'impression que les choses empirent chaque jour.» La présence des 950 militaires français de «Licorne» la rassure. «On sait qu'ils pourront venir nous chercher mais il reste une angoisse.» Elle se refuse à partir. «Mes affaires ne me le permettent pas.» Pour conjurer le mauvais sort, elle téléphone à ses amis, fait renforcer son portail et compte sur son chien.

«Nos politiques parlent trop»
Combien sont-ils ainsi à Abidjan, terrés dans leurs maisons? Les autorités françaises avouent l'ignorer. Officiellement, 15.000 Français y résident mais le chiffre est trompeur. Un grand nombre, au moins 60%, sont des binationaux. Certains ne vivent en Afrique qu'une partie du temps. Enfin, beaucoup, entre les événements politiques et les vacances de Noël, ont déjà choisi de prendre le large. Les grandes entreprises françaises ont ainsi fait partir toutes les familles et la plupart des cadres. «Il y a une inquiétude légitime dans la communauté», dit-on au consulat de France. Paul, un entrepreneur, résume la situation: «Pourquoi prendre des risques alors que l'on peut aller passer des vacances en France?» Bernard Sadet, élu UMP de l'assemblée des Français de l'étranger, s'agace: «Nos politiques parlent trop. Ils nous mettent en danger. Que se passera-t-il dans 15 jours ou un mois si rien n'est résolu?» R., propriétaire d'un restaurant connu, reste discret car il entend rester en Côte d'Ivoire. «La communauté française commençait à revenir. On comptait environ mille Français de plus chaque année. C'était bon signe et, comme moi, on espérait investir après les élections. Cela serait dommage de gâcher tout ça.» Alors il se raccroche aux bons signes. Dans ses meetings désormais quotidiens avec les jeunes, Charles Blé Goudé, leader des manifestations de 2004 et nouveau ministre de la Jeunesse, enjoint ses partisans «de protéger les Français et les entreprises françaises». Une main tendue, qu'il suspend à une condition: «Que l'on ne touche pas à un cheveu de M. Ggagbo... Car là, nous serons prêts.»

Une intervention africaine contre Gbagbo est envisagée, La Croix, 20 décembre 2010- (...) La solution au problème ivoirien se cherchait lundi 20 décembre en Afrique. Pas très loin d'Abidjan, du côté des pays frontaliers. Un haut responsable du RHDP, le parti qui soutient le président élu Alassane Ouattara, explique : « Laurent Gbagbo peut céder face à des bruits de bottes en provenance du Liberia, du Ghana, de Bouaké (NDLR : ville du nord du pays, fief des « Forces nouvelles » fidèles au président élu) et de la mer. C'est ce que préconise le premier ministre kényan, Raila Odinga. » Ce dernier avait envisagé vendredi que les pays frontaliers de la Côte d'Ivoire massent des troupes à leurs frontières et donnent un ultimatum de quelques heures au président Gbagbo pour qu'il reconnaisse sa défaite (...)

Équilibre entre les deux armées ivoiriennes

La mise en place d'une force d'intervention africaine, appuyée par les Forces nouvelles qui tentent de descendre du nord du pays, peut demander du temps. « Elle pourrait recevoir un appui logistique d'armées occidentales, notamment française et américaine », espère le cadre du RHDP. De nombreuses rumeurs circulent sur l'équilibre des forces entre cette armée du Nord, soutien d'Alassane Ouattara, et les forces fidèles à Laurent Gbagbo. La sortie ratée des partisans d'Alassane Ouattara, jeudi dernier, depuis l'hôtel du Golf vers la télévision publique, fait douter : « Les Forces nouvelles sont une armée en déroute, largement désarmée. À l'hôtel du Golf, elle s'est trouvée très vite à court de munitions », estime un avocat. À l'inverse, un expert à Abidjan voit un équilibre entre les deux armées ivoiriennes. « Si l'on oublie l'armée de terre qui se battra très peu pour Gbagbo, le rapport de force est équilibré entre la garde républicaine fidèle au président sortant et les Forces nouvelles. » (...) Côté armement, « les Forces nouvelles n'ont pas de blindés, mais elles possèdent des armes antichars pour neutraliser ceux qu'elles trouveront sur leur route avant Yamoussoukro. L'armée de Gbagbo possède également quatre lance-roquettes multiples, difficiles à manier. Son seul hélicoptère de combat est facilement neutralisable », estime l'expert. On annonçait lundi que les Forces nouvelles étaient proches de Yamoussoukro. « Prendre la ville natale du premier président Houphouët-Boigny, c'est bien, mais ça ne sert pas à grand-chose. Le port de San Pedro ou la ville d'Abidjan sont autrement plus stratégiques », confie une source occidentale. Pour cette source, « les sanctions internationales sont nécessaires, mais pas suffisantes. »

À Bouaké, on se décourage

À Abidjan, la peur est partout. Le chef de l'Opération de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci), Choï Young jin, a constaté lundi « qu'à partir du 15 décembre le camp du président Gbagbo a accru les actes hostiles à l'endroit de la communauté internationale. Il a commencé à envoyer des jeunes gens armés aux domiciles des personnels des Nations unies pour frapper à leur porte et demander la date de leur départ ou entrer pour y effectuer des fouilles sous prétexte de chercher des armes. »
Pendant ce temps, à Bouaké, on se décourage. « On a le sentiment que Gbagbo veut prendre sa revanche et que Ouattara s'est laissé enfermer à l'hôtel du Golf. L'hôpital de Bouaké accueille de nombreux blessés qui sont des militaires des Forces nouvelles », constate un enseignant. À la différence d'Abidjan, la grande ville du nord est calme et peut recevoir les chaînes de télévision et de radio étrangères. Depuis le deuxième tour des élections, Bouaké a enregistré quelques défections de fonctionnaires favorables à Laurent Gbagbo, qui se sont installés dans le sud du pays. De Bouaké, la fermeté affichée de la communauté internationale – et notamment de Paris – inquiète certains. « Quand on n'a pas les moyens de ses menaces, il vaut mieux ne pas menacer », relève un Français de Bouaké.

Attaques de mosquées en Côte d'Ivoire : Les vieux démons sont lâchés, Le Pays, 21 décembre 2010- Les nouvelles en provenance d'Abidjan ne sont pas bonnes. Chaque jour qui passe rapproche le pays un peu plus du chaos. Violences physiques et verbales tiennent le haut du pavé, chaque camp veut impressionner l'autre, marquer des points, comme on dit. Malheureusement, tout ceci se fait au prix du sang versé d'innocents Ivoiriens qui, pendant huit ans, ont attendu, dans l'espoir, la fin de la crise.(...) Avant-hier, l'on a assisté à des enlèvements de militants du RHDP dans leurs familles. Désormais, ce sont les mosquées qui sont prises pour cibles. Bientôt, on assistera peut-être à des arrestations au faciès. Sait-on jamais. Toujours est-il qu'avec ces exactions relevées çà et là, la Côte d'Ivoire est en train de revivre le scénario de la division ethnique et du régionalisme qui nourrit les motivations de la rébellion de 2002. Blé Goudé et les siens ne se sont jamais aussi bien sentis que dans la position du repli identitaire, d'un discours aux relents faussement patriotiques ou nationalistes. Ils aiment la Côte d'Ivoire au point de mourir pour elle ? Pas si sûr pour l'instant. Mais ce qui est évident, c'est qu'il y aura encore des morts si le camp Gbagbo reste sur sa position. C'est une position suicidaire, sans issue. Comme un forcené, Gbagbo a fermé toutes les portes derrière lui, notamment celle du dialogue et de la négociation. Il est peut- être prêt à en payer le prix quant à son propre sort. Mais l'ardoise qu'il va laisser à la Côte d'Ivoire sera rouge du sang de nombreux martyrs de la démocratie, victimes d'un pouvoir qui, finalement, n'a jamais su rendre aux Ivoiriens, l'espérance d'une terre prospère et hospitalière. Gbagbo et ses partisans, il faut le craindre, sont dans la stratégie du chaos. Ils vont tenter de faire payer à leurs contempteurs le prix de leur trahison en s'alliant aux "étrangers". C'est pour cela qu'il est urgent d'agir avant que de nouveaux escadrons de la mort ne se mettent en place. Les sanctions de l'Union européenne qui lui interdisent de mettre pied en Europe ne lui ont jamais fait peur, pas plus que la menace d'être inculpé un jour par un tribunal international. C'est pour toutes ces raisons que Gbagbo et les siens sont devenus dangereux. Ils s'emmurent et résisteront jusqu'au bout. Même la reconduction du mandat de l'ONUCI pour six mois et le renforcement de son effectif n'y changeront rien. A moins que ...

Crise ivoirienne: Ultimatum contre ultimatum, L'Observateur paalga, 21 décembre 2010- (...) Forts d'un mandat prorogé de 6 mois par un Conseil de sécurité unanime, les casques bleus n'ont désormais d'autre choix que celui de tenir bon et de protéger et protéger encore les civils ainsi qu'un hôtel du Golf aux allures de camp retranché ». L'étau se resserre davantage sur Laurent Gbagbo et ses institutions. Et si jamais l'enfant terrible de Mama parvient à tenir tête et à surnager dans cet océan d'hostilité, au moins jusqu'à la St-Sylvestre, il se pourrait qu'il réussisse ainsi à franchir le seuil de l'année, franchissant du même coup un grand pas vers son hypothétique maintien au pouvoir. Mais dans cette situation de pourrissement entretenu par le camp Gbagbo, le pire est vécu par les populations civiles qui, en plus des difficultés socio-économiques, doivent faire face aux nombreuses victimes d'exactions diverses. Et le décompte des morts n'est pas fini. Désormais, la question que l'on peut se poser reste de savoir jusqu'à quel stade évolueront les sanctions que la Communauté internationale vient de mettre en œuvre pour contraindre le président sortant à lâcher prise. Ira-t-on, par exemple, jusqu'au gel des avoirs de l'Etat Ivoirien à l'extérieur et notamment à la BCEAO ? Rien n'est moins sûr, car si elle a l'avantage d'être radicale et particulièrement efficace, une telle sanction ne serait ni plus ni moins qu'un couteau à double tranchant. On imagine que les Etats de l'UEMOA réfléchiront par deux fois avant de toucher à un domaine aussi sensible que la monnaie, surtout quand on sait qu'à elle seule, la Côte d'Ivoire représente 40% du poids économique de la sous-région. Il faudra donc continuer à s'arracher les cheveux en espérant trouver la solution providentielle qui viendra enfin abréger les souffrances des Ivoiriens