Retranscription de l'interview accordée par le Président de la République, Alassane Ouattara, à ONUCI FM et à Radio Côte d'Ivoire à Bondoukou, lors de sa tournée dans la région du Zanzan du 27 au 30 novembre 2012.

4 déc 2012

Retranscription de l'interview accordée par le Président de la République, Alassane Ouattara, à ONUCI FM et à Radio Côte d'Ivoire à Bondoukou, lors de sa tournée dans la région du Zanzan du 27 au 30 novembre 2012.







L'interview à été diffusée
intégralement, le dimanche 02 décembre à 11h00, sur les antennes d'ONUCI FM et
rediffusée, le lundi 03 décembre 2012, après le journal de 07h00.




 




-------------------------




Radio Côte d'Ivoire :
Monsieur le Président de la République bonjour




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara

: Bonjour Madame




 




Radio Côte d'Ivoire : Vous
venez de terminer une visite de quatre (04) jours dans le district du Zanzan et
c'est un honneur pour nous de nous recevoir juste à l'issue de cette visite.
Pour vous interroger, Constant Mahilet de ONUCI FM et moi-même Saly Sliué Konaté
de Radio Côte d'Ivoire. Alors Monsieur le Président, quelles sont les raisons
qui ont motivé cette visite de travail dans le district du Zanzan ?




 




Le Président ivoirien,
Alassane Ouattara
 :
Merci
beaucoup Madame. En tout cas je suis heureux d'avoir cette opportunité. Vous
savez, le Zanzan est la région la plus pauvre de Côte d'Ivoire. Je l'ai constaté
à l'occasion de la campagne présidentielle. Bien sûr c'est une région que je
connais bien aussi, puisqu'elle est proche de Kong, ma terre paternelle, et
après l'ouest qui a connu beaucoup de meurtrissures et de problèmes à l'issue de
la crise postélectorale, j'ai estimé que je devais venir ici dans le Zanzan
apporter ma compassion aux populations, et qu'elles comprennent qu'elles ne sont
pas oubliées, que j'ai fait des promesses, et je suis venu leur dire ce que nous
avons commencé à faire, ce que nous allons faire, et dans quels délais, leur
donner un message d'espoir. Je sens que mon message a été bien compris et je
m'en réjouis.




 




ONUCI FM : Monsieur le
Président de la République, c'est vraiment un réel plaisir de vous retrouver,
parce que depuis la campagne électorale ou je vous ais interrogé par deux fois,




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

Tout à fait.




 




ONUCI FM : Nous ne nous
sommes pas revu, félicitations à vous à la tête du pays




 




 Le
Président de la République,
Alassane Ouattara
: Merci beaucoup, merci beaucoup.




 




ONUCI FM : Alors pour la
question, nous voulons juste savoir Monsieur le Président de la République, quel
est le constat général que vous avez fait au terme de ces quatre (04) jours de
visite ? Parce que vous avez quand même parcouru neuf (09) départements du
Zanzan.




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

Tout à fait. Non vous avez raison, j'ai parcouru les neuf départements du
Zanzan, aussi bien dans le Bounkani que dans le Gontougo et mon premier constat
c'est de dire que je sens une région qui recommence à vivre et qui croit en
l'avenir. Je vous donne un exemple très simple. Pendant les deux campagnes, les
deux visites que j'ai eu à effectuer ici, la dernière c'était en octobre 2009,
quand j'allais dans une cour et que je voulais me laver les mains, même chez les
Préfets, il n'y avait pas une goutte d'eau. Partout où je suis passé, il y avait
de l'eau dans les maisons, c'est déjà pas mal. A Bondoukou, je me suis lavé dans
un seau d'eau, vous voyez ! Chaque fois que je suis venu ici, pas une goutte
d'eau dans la ville de Bondoukou. Maintenant il y a de l'eau courante ce n'est
pas complet, il n y avait pas d'électricité, nous avions du amener un groupe
électrogène à Bondoukou comme à Bouna. Aujourd'hui, il y a de l'électricité ;
les centres de santé n'avaient pas de médicaments, mon épouse a fait un certain
nombre de tours dans les centres de santé, elle a amené des cadeaux, beaucoup de
médicaments .Beaucoup de parents me disaient que leurs enfants n'allaient pas à
l'école parce qu'ils n'avaient pas de fournitures pour les enfants ; selon nos
statistiques, cette année le nombre d'enfants envoyés à l'école a augmenté de
15%, c'est-à-dire que maintenant les parents envoient leurs enfants à l'école.
Alors je pourrais continuer, c'est pour vous dire que voici une région qui
recommence à vivre, qui croit en l'avenir et par conséquent, c'est une grande
joie pour moi, je m'en réjouis c'est ce que je voulais pour cette région et j'ai
démarré, je signale que je n'ai fais que dix-huit (18) mois de mon mandat et je
veux que ces populations comprennent que j'ai encore trois (03) ans devant moi
et que nous allons accélérer le rythme, et que nous ferons beaucoup plus dans
les dix huit (18) mois à venir que dans les dix huit (18) mois passés, à
fortiori, sur les trois (03) années à venir.




 




Radio Côte d'Ivoire : Alors
quels sont véritablement les engagements que vous prenez à l'issue de cette
visite pour véritablement « booster » le développement dans la région du
Zanzan ?




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara
 :
Oui, je suis mon programme de gouvernement. Vous voyez,
nous avions d'abord fait une étude exhaustive avant la campagne électorale, nous
avons recensé les problèmes des départements, des Sous-préfectures mêmes des
villages. Les problèmes sont à peu près les mêmes : des problèmes d'eau,
d'électricité, des problèmes sociaux, d'écoles, de santé et d'infrastructures.
Alors, ce sont ces problèmes recensés que nous tentons de résoudre en faisant un
calendrier d'exécution. Par conséquent, je me réjouis de voir que dans chacun
des départements, par exemple, si vous prenez dans le Bounkani, que ce soit bien
sûr à Bouna, que ce soit à Doropo, que ce soit à Téhini, que ce soit à Nassian,
partout ce sont les mêmes problèmes. Nous avons commencé l'exécution. Il y a des
endroits où nous sommes à 50 % d'exécution de notre programme, dans d'autres
endroits, c'est à 25%, mais nous continuerons, c'est la même chose dans le
Gontougo.




 




ONUCI FM : Monsieur le
Président de la République, qu'en est-il alors de ces quatre cent cinquante
milliards de Francs CFA (450 milliards) annoncés pour le relancer le
développement dans cette région, et est que vous pouvez nous préciser la clé de
répartition ?




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara
:
Vous savez  les quatre cent cinquante milliards (450 milliards) sont pour la
région du Zanzan. Il y a une partie bien sûr pour la région du Bounkani et une
partie pour le Gontougo. Pour le Bounkani, c'est cent soixante trois milliards
(163 milliards) et pour le Gontougo donc, c'est deux cent quatre vingt sept
milliards (287 milliards). Cela comprend tout vous voyez ! Bon je prends un
exemple, Bouna-Doropo est une route importante, et donc sur les cent soixante
trois milliards (163 milliards), cette route fait trente-huit milliards (38
milliards), presque quarante milliards (40 milliards). Nous avons obtenu les
financements, c'est donc quelque chose de réglé et qui va être mis en exécution.
Nous avons ensuite réhabilité une partie du tronçon Bouna- Bondoukou qui est
totalement détériorée, là l'Union Européenne va nous aider, ensuite nous avons
par exemple une requête que nous avons entendu partout, c'est la question de la
remise en état du pont sur la Comoé, cela fait cinq milliards (05 milliards),
nous avons mis en place les cinq milliards (05 milliards), les travaux
commencent l'année prochaine, et ainsi de suite. Nous avons l'université de
Bondoukou qui est aussi dans le programme, c'est un investissement d'à peu près
vingt (20) à vingt cinq (25) milliards, nous avons également l'intention de le
faire. Certains de ces investissements seront faits sur ressources propres,
c'est-à-dire sur le budget de l'Etat et d'autres par des ressources extérieures.
Et c'est en cela que le PPTE est très important ne serait-ce que par exemple la
France, qui vient d'annuler 2000 milliards de remboursements de dette que nous
lui devons. Ces montants seront répartis par année et seront consacrés à des
investissements dans les secteurs sociaux notamment. Et ces ressources
permettront de construire des écoles, des centres de santé, des routes et
autres. C'est important que l'on sache que la notion générale de dire qu''on ne
voit pas l'argent circuler'', bien sûr on ne voit pas l'argent circuler, parce
qu'il y a moins de corruption, mais on voit l'argent investi dans les ponts,
dans les des écoles, dans les centres de santé, donc la majorité de la
population bénéficie de l'argent public, et c'est ce que moi je veux et non pas
donner la possibilité à une minorité de bien vivre et d'oublier les autres. Et
donc, je suis déterminé à exécuter ces projets et nous avons les moyens de le
faire.




 




Radio Côte d'Ivoire :
Monsieur le Président, le message ici dans le District du Zanzan a été un
message de développement mais également un message de paix et surtout de
réconciliation nationale. Vous avez beaucoup insisté sur la réconciliation
nationale dans vos différentes interventions, alors que doit-on comprendre quand
vous parlez de gestes forts dans les prochains jours ?




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

Oui, vous savez, la réconciliation est indispensable pour notre Nation. Il y a
eu des divisions, ensuite des fractures, ensuite une guerre fratricide, des
armées se sont affrontées, nous avons eu plus de 3000 morts. C'était
traumatisant pour les Ivoiriens. Maintenant, à l'issue de cette crise il y a eu
des arrestations. Il faut maintenant passer à la phase suivante qui est la
nécessité que la justice fasse son travail pour permettre au Président de la
République d'user de son droit de grâce. Ceci me parait indispensable. Nous ne
pouvons pas rester dans une situation de tension permanente avec des
personnalités, qui peut être par ambition personnelle ou autre situation, mais
qui n'ont pas commis de crimes de sang. Voilà ce dont je parle quand j'indique
qu'il y aura des gestes forts mais cela ne peut se faire que quand la justice
fera son travail. Moi je suis pour de l'Etat droit. Nous devons construite
l'Etat droit, cela veut dire que je ne peux pas appeler des juges pour leur
donner des instructions. La justice doit faire son travail. Je comprends qu'elle
n'avait pas les infrastructures. Souvenez-vous, à l'issue de la crise
postélectorale, les prisons avaient été cassées, les Tribunaux, les Cours
n'étaient pas du tout en mesure d'accueillir des gens. Il n'y avait même pas de
machines, il n'y avait pas de téléphone, beaucoup de juges avaient fui etc. Il
n'y avait pas internet, il n'y avait rien du tout dans les Tribunaux. Et tout
cela a pris du temps, il fallait 6 à 8 mois, et après cela il faut entreprendre
des enquêtes, après mettre en place des Cours d'Assises. Tout cela est
maintenant fait, les jugements vont commencer et ces jugements doivent aller
très rapidement. Pour les militaires cela a déjà commencé, il faut maintenant
passer au jugement des civils et en finir avec cette situation. Ceux qui doivent
rester en prison pour des crimes de sang doivent l'être, mais ils sont bien sûr
considérés comme innocents jusqu'à ce que la justice fasse son travail. Mais il
est clair qu'un certain nombre de personnes doivent pouvoir avoir la possibilité
d'avoir leur liberté dans les meilleurs délais.  



 




Radio Côte d'Ivoire : Dans
vos propos on a pu s'apercevoir que le pardon, la réconciliation nationale ne
peuvent se faire que s'il y a repentance pour que le pardon advienne. Parce que
vous avez toujours lié le pardon à la repentance.




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

Moi je ne lie pas, mais je considère que c'est même dans nos traditions. Quand
on va vous demander pardon, quand on accorde son pardon, c'est parce que la
personne est venue vous dire j'ai fauté et que ce soit dans toutes les religions
d'ailleurs, chrétienne comme musulmane, les deux vont ensemble, mais ce ne sont
pas des conditions préalables. Je crois que c'est de l'intérêt de tous quand on
a commis une erreur, on accepte de le dire et d'ailleurs le Seigneur le
pardonnera plus facilement à fortiori des êtres humains. Je crois qu'il faut
nécessairement se pardonner. Ceux qui ne veulent [pas faire de repentit c'est
leur décision personnelle mais ma conviction mais ma conscience, moi, me dit que
si j'ai fauté, que je reconnais que j'ai fauté, je demande pardon, je demande la
grâce pour que nous puissions tourner la page. Ceci me parait essentiel compte
tenu de notre culture et de notre religion dans notre pays.




 




ONUCI FM : Monsieur le
Président, on vous suit parfaitement pour parler de justice et l'on a constaté
que la Commission Nationale d'Enquête a livré les résultats de ses enquêtes et
jusque-là nous sentons la justice un peu lente et vous nous avez rassurés tantôt
pour dire que les choses vont aller très vite. Est-ce à dire que les grands
procès vont s'ouvrir sur la crise postélectorale dans peu de temps ?




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

C'est ce que moi je souhaite, mais vous savez, je ne peux pas vous dire à quel
rythme la justice va travailler, mais je peux vous dire que la Commission
Nationale d'Enquête a fait son travail. Les Commission antérieures qui ont été
mises en place dans notre pays, quelques fois n'ont jamais rendu leur rapport.
J'ai fait exprès avec le Gouvernement en créant cette Commission de
dire : « Ecoutez, vous avez 6 mois renouvelables, une seule fois ». Cela a
obligé la Commission Nationale d'Enquête à donner les résultats de son enquête
en 12 mois. Maintenant, ce rapport je l'ai rendu public, je l'ai remis devant la
Nation entière, devant le monde entier, aux mains du Ministre de la Justice et
maintenant, il lui appartient d'actionner les enquêtes et les suites
judiciaires. Je pense qu'il y a suffisamment de matière pour que cela puisse se
faire et que cela permettra d'arrêter cette notion de justice des vainqueurs,
parce que sur ces cas qui ont été recensés, il y a des gens qui étaient bien sûr
entre guillemets '' pro-Gbagbo'' et ceux qui étaient considérés comme
pro-Ouattara. Mais tous ceux qui ont commis des crimes passeront devant la
justice. Il n'y aura pas d'impunité, il n'y aura de protection pour personne.




 




Radio Côte d'Ivoire :
Monsieur le Président de la République, on va dire un mot  du nouveau
Gouvernement qui a été formé récemment juste avant votre visite dans le Zanzan.
Vous venez de passer quatre jours dans le Zanzan, vous avez promis de respecter
vos engagements. Alors, qu'est ce que vous attendez  de ce Gouvernement de M.
Daniel Kablan Duncan ?




 




Le
Président de la République
, Alassane Ouattara:

Oui, d'abord pourquoi j'ai fait ce Gouvernement ? Il y avait une crise
institutionnelle, c'était normal qu'elle puisse être réglée. Je me réjouis
d'ailleurs que cela ait été réglé à la satisfaction de tous et que les
incompréhensions et les intoxications par rapport à ce Code de la famille aient
été levées. Nous sommes quand même des Africains, nous avons nos coutumes. Le
fait de vouloir être modernes ne veut pas dire qu'on impose à un foyer tel ou
tel comportement. Beaucoup de familles sont polygames pourtant la polygamie
n'est pas autorisée par la loi en Côte d'Ivoire. Donc, c'était un faux débat
mais il fallait resserrer nos rangs au sein du RHDP. Je crois c'est chose faite,
mais évidemment maintenant chaque fois qu'il y a une crise institutionnelle, il
y a une opportunité politique. J'ai considéré, ayant entendu les commentaires et
les opinions de mes concitoyens, que nous avions trop de Ministres et qu'il y
avait un éparpillement du processus de décisions. C'est pour cela que j'ai
réduit le nombre de Ministère de 35 ou 36 à 28 et d'ailleurs il y a quand même
11 Ministres qui ont quitté le Gouvernement. Les gens ne le mentionnent pas
assez. C'est un remaniement important. Quasiment le tiers du Gouvernement a été
remplacé. Certains Ministres, bien sûr, étaient plus politiques, je les ai
remplacés par des personnalités connues dans le secteur qui est le leur. Je
prends le Ministère des Finances, je prends le Ministère de l'Industrie avec
Jean-Claude Brou qui a géré le Comité de privatisation quand j'étais Premier
Ministre, je prends le Ministère du Commerce avec M. Jean-Louis Billons, je
prends le Ministère du Tourisme avec notre frère Roger Kakou qui a géré de très
grandes chaines d'hôtellerie dans le monde, je prends Me Affoussy Bamba  qui est
donc une femme bien connue pour sa maitrise du porte-parolat et de la
communication. Vous voyez c'est un Gouvernement resserré en faisant rentrer des
personnalités qui sont des spécialistes dans leur secteur. Ceci permettra une
accélération des choses et nous avons comme Premier Ministre, un chef
d'orchestre du Gouvernement qui a occupé cette fonction pendant 6 ans sous
l'autorité du Président Bédié et qui été également quasiment Vice-premier
Ministre quand moi j'étais Premier Ministre de 90 à 93, qui connait donc
l'économie ivoirienne, qui connait la société, qui connait mes méthodes de
gestion. Le Premier Ministre Ahoussou a fait du bon travail, mais nous avons une
autre mission pour lui que le Président Bédié et mois, avec nos alliés du RHDP,
nous allons préciser ultérieurement. Il n'a pas démérité mais il était question
de mettre chacun à sa place pour nous permettre de renforcer le RHDP.




 




ONUCI FM : Et quels sont les
objectifs que vous fixez à cette nouvelle
équipe
gouvernementale M. le Président de la République?



 




Le Président
de la République, Alassane Ouattara:

Les objectifs sont de respecter notre programme de Gouvernement, d'accélérer la
mise en œuvre de ce programme, de mobiliser le maximum de ressources même
au-delà de ce que nous avons programmé. Souvenez-vous, pendant ma campagne,
j'avais parlé de 11.000 milliards de FCFA. Nous avons un groupe consultatif la
semaine prochaine à Paris, début décembre. Nous sommes quasiment certains de
mobiliser cette somme. Donc, il y aura la mobilisation des ressources
extérieures mais il y aura également la mobilisation des ressources intérieures,
c'est-à-dire les recettes d'impôt, de douane, des recettes non fiscales pour
permettre à la Côte d'Ivoire une meilleure utilisation des ressources publiques.
Comme je le disais, l'argent circulera pour construire des ponts, pour
construire des écoles, des centres de santé pour créer des universités et ainsi
de suite. Et cela a déjà commencé puisque le taux de croissance en cette année
est déjà estimé à 8,6% par le Fonds monétaire International et l'année prochaine
nous sommes quasiment certains d'avoir un taux de croissance équivalent.
L'objectif est qu'avec tout ce que nous avons comme potentialités, comme
investissements, dans deux ans, à partir de 2015, la Côte d'Ivoire ait un taux
de croissance au-delà de 10%, ce qui aura comme conséquences de réduire le taux
de pauvreté d'un Ivoirien sur deux à un Ivoirien sur quatre. C'est déjà quand
même pas mal.




 




Radio Côte d'Ivoire :
Monsieur le Président
de la
République , vos ambitions économiques et financières pour la prospérité et le
développement de la Côte d'Ivoire sont tout à fait nobles, mais cela demande un
contexte de paix et de sécurité. Quelle appréciation faite vous de la situation
sécuritaire et même des Droits de l'homme en Côte d'Ivoire.




 




Le Président
de la République, Alassane Ouattara:

Vous savez, nous devons être transparents dans ce que nous faisons et nous avons
également une méthodologie de régler les problèmes de la Côte d'Ivoire et des
Ivoiriens et il fallait au départ, régler les problèmes urgents, ce  que j'avais
appelé avec le programme présidentiel d'urgence et les résultats sont bons. Et
ensuite nous devions nous attaquer aux questions de sécurité, c'est ce que nous
avons fait, réintégrer les deux armées, faire en sorte que la chaîne de
commandement soit précisée, donner des moyens à la police, à la gendarmerie et à
l'armée et ainsi de suite. Nous l'avons fait également. Il fallait s'attaquer à
la question de la division de la société ivoirienne. J'ai mis en place la
Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation (CDVR), mais tous ces chantiers
vont ensemble. Ce n'est pas comme si on règle un chantier avant de passer à
l'autre. Donc tout cela est en marche aujourd'hui. La réconciliation est en
marche. Vous étiez là vous avez assisté, je crois que c'est à Tanda quand il y
des chefs Attiés qui sont venus auprès du roi des Abrons pour présenter leurs
excuses pour ce qui s'est passé, pour ce qui n'a pas été une bonne chose de leur
part. La repentance est là, maintenant ils sont totalement engagés. Ils ont
indiqué qu'ils reconnaissent leurs fautes et ils voulaient demander pardon pour
que les Abrons, les autres communautés qui ont eu des difficultés avec ces chefs
puissent comprendre qu'ils doivent vivre ensemble. C'est important. C'est à dire
que la réconciliation n'est pas seulement l'affaire du Chef de l'Etat, de la
Commission, du Gouvernement mais de chaque Ivoirien, des chefs traditionnels,
des chefs religieux. J'ai reçu il y a un peu plus d'un mois, tous les Evêques de
Côte d'Ivoire et nous avons parlé pendant pratiquement deux heures de temps. Je
reçois bientôt le COSIM et l'association des pasteurs. Donc en matière de
réconciliation, j'ai bon espoir parce que les choses avancent. Maintenant, en
matière de sécurité, les choses allaient très bien jusqu'au mois de juillet
quand je suis allé en Tanzanie, la Banque Africaine de Développement (BAD) qui
tenait son Assemblée générale annuelle avait décidé que la BAD serait transférée
en Côte d'Ivoire parce que l'indice d'insécurité était tombé de 4 à 2.
Malheureusement, au mois d'août-septembre, Nous avons connu ces attaques contre
le camp d'Akouédo, les commissariats ici et là mais nous avons réagi parce que
nous étions bien organisés pour faire face à toute tentative de déstabilisation.
Les  choses ont été rapidement maitrisées et maintenant l'indice d'insécurité
est tombé de 4 à 1. C'est dire qu'au plan de la sécurité, au moment où je vous
parle, les choses se passent bien et  on ne peut pas avoir de développement sans
sécurité, sans paix. Ceci étant, à l'occasion de ces attaques, des miliciens
attaquent des camps militaires, attaquent des commissariats, la réaction des
autres a été brutale, parce que ce sont des militaires, ils sont habitués à
l'utilisation des armes. Il y a eu sans doute des dérapages. Il nous appartient
à nous de faire des enquêtes et de nous assurer que l'Etat de droit que nous
voulons développer, se matérialise. Donc des enquêtes sont en cours. Malgré
cette situation, il faudra sans doute voir ce qui s'est réellement passé. Moi
j'accepte toutes les recommandations des structures des Droits de l'homme, que
ce soit Amnesty, Human Right Watch, FIDH, c'est très bien mais nous voulons que
ceci se fasse dans un esprit positif. Nous ne voulons pas nier ce qui s'est
passé dans notre pays, mais les circonstances étaient là. Moi je suis chargé
d'assurer la protection et la sécurité de mes concitoyens. Des personnes venues
de pays voisins viennent attaquer des familles innocentes,  des camps
militaires, des commissariats et on veut que je reste les bras croisés, ce ne
sera pas le cas. Mais par contre, j'en appelle maintenant au renoncement à la
violence. C'est comme cela que nous allons pouvoir entreprendre des démarches et
faire en sorte que ce pays trouve une paix durable




 




ONUCI FM : Evoquons à
présent le DDR Monsieur le Président de la République. Avec la création de
l'ADDR, c'est autorité du DDR. Est-ce qu'on peut espérer cette fois que ce
processus puisse aboutir




 




Le Président de la République,
Alassane Ouattara
:
Pourquoi
nous avions des difficultés ? Parce qu'il y avait sept (7) structures qui
faisaient la même chose ? Toutes ces structures ont été regroupées en une seule,
l'ADDR, l'Autorité du Désarmement, Démobilisation et Réinsertion. Nous avons la
chance d'avoir à la tête de cette structure un de nos compatriotes qui a fait ce
travail au Congo Kinshasa où le problème était plus large, plus profond et qui a
une bonne expérience et qui reprend tout le processus à zéro. Il a déjà montré
sa capacité, il a déjà pu amener un certain  nombre de jeunes gens à abandonner
les armes et à adhérer au processus et certains seront recrutés comme gardes
pénitentiaires, forestiers, comme des agents de douane, ainsi de suite. Ces
jeunes gens, on doit leur donner un avenir. On ne fait pas de discrimination. Ce
ne sont pas seulement des jeunes gens qui ont combattu avec un groupe et qui
doivent être privilégiés. Bien sûr, il y a des méfiances en ce moment mais ce
programme doit être étendu à tous y compris aux miliciens parce que les
miliciens, ces jeunes gens, ils ont été manipulés. On leur a dit, '' venez faire
telle chose on vous sonne de l'argent''. Mais ce sont des Ivoiriens, il faut les
prendre en compte et ils seront pris en compte, je pense dans les prochains
mois.




 




Radio Côte d'Ivoire :
Monsieur le Président de la République, depuis que vous êtes à la tête du pays
il y a 18 mois, vous avez effectué beaucoup de déplacements à l'extérieur du
pays. Alors, entre deux avions, quelles sont les retombées de ces nombreux
voyages pour la Côte d'Ivoire ?




 




Le Président de la République,
Alassane Ouattara :
Ces voyages qu'on me reproche
sont des voyages qui sont nécessaires pour notre pays. Nous avons un pays qui a
été totalement isolé pendant des années, un pays où même certaines personnes qui
sont originaires de pays voisins ne se sentaient pas en sécurité. Ces voyages
ont d'abord lieu pour améliorer les relations avec les pays voisins, c'était la
première chose. La deuxième chose, ces voyages avaient un objectif, pas
seulement diplomatique mais également économique parce que maintenant il faut
faire de l'éco-diplomatie. J'ai voulu aller dans des pays tels que le Nigeria,
le Ghana, bien sûr les pays de l'UEMOA avec lesquels nous avons des relations
économiques fortes pour nous assurer que nous allons améliorer nos relations
commerciales et économiques avec ces pays. Et au-delà, le monde maintenant avec
la mondialisation, tout est intégré. Nous avons un ambitieux programme de
développement. Pour le financement de ce programme, il faut nécessairement des
ressources intérieures mais il faut également des ressources extérieures. Ces
missions ont eu pour but de voir comment un certain nombre de pays pouvaient
venir en aide à la Côte d'Ivoire. Je prends le cas de la France. C'est grâce à
ces démarches, à ces voyages que la France va bientôt signer l'allègement de
2000 milliards de FCFA. Donc ces voyages ont apporté, ne serait-ce que du côté
français, 2000 milliards de FCFA à la Côte d'Ivoire. Je prends le cas de la
Chine. Nous avons de grands projets tels que le chemin de fer qui va aller de
San-Pedro à Man avec branchement sur Ouagadougou. C'est un milliard et demi de
dollars. Nous avons le barrage de Soubré qui fait 500 millions de dollars. Donc
rien que ces deux projets valent deux milliards de dollars et cela  fait 1000
milliards de FCFA.  Donc, je peux vous dire, ces deux voyages nous ont apporté
3000 milliards de FCFA. Et je peux continuer. J'irais en Allemagne en janvier,
je vais également procéder à la signature de l'abandon de la dette. Nous devons
à l'Allemagne 500 millions de FCFA. Ce voyage permettra l'allègement de cette
dette et ainsi de suite. Je suis également allé en Israël, un pays où il y a
beaucoup de sociétés qui viennent investir dans le pays, je suis allé en Arabie
Saoudite  et également le Président de la Banque Islamique de Développement est
venu en Côte d'Ivoire. Ils ont maintenant décidé de financer toute une série de
projets, terminer l'autoroute Abidjan-Yamoussoukro, continuer jusqu'à Bouaké,
ils vont construite la route Boundiali-Odienné pour aller sur Kankan et la
Guinée et ainsi de suite. Vous savez, ces voyages ne sont pas des voyages de
plaisir. C'est épuisant ces voyages. Vous faites un vol d'Abidjan, vous arrivez
le lendemain, vous êtes en réunion, vous finissez vous repartez, mais j'en suis
très satisfait parce que je peux vous dire qu'en 2012, c'est des milliers de
milliards que j'ai apporté à mon pays et je continuerai. C'est cela la
diplomatie moderne. Un Chef d'Etat ne peut pas s'asseoir à la maison et penser
que les gens viendront à lui et tout simplement lui faire des compliments. Nous
devons aller vers les autres, les convaincre que notre pays est un pays
fréquentable, un pays d'opportunités, un pays où les gens peuvent faire des
affaires et avoir de l'argent parce que ceci est important pour réduire le
chômage, le chômage des jeunes notamment....



 




Radio Côte d'Ivoire : Sans
compter le repositionnement de la Côte d'Ivoire qui était complètement isolée.
Alors Constant Mahilet vous avez....




 




ONUCI FM : Oui nous allons
juste dire un mot M. le Président sur la sous-région avant de refermer cet
entretien. Parce que nous le savons tous, vous êtes le Président en exercice de
la CEDEAO, la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest. Alors, où
en est-on avec ces dossiers brûlants du règlement de la crise au Mali voisin
mais également en Guinée-Bissau ?




 




Le Président de la République,
Alassane Ouattara:

Avant de parler du Mali et de la politique
régionale, je voudrais dire deux ou trois choses. Nous sommes au travail et
c'est sincèrement que je le dis, ce Gouvernement est au travail, je félicite les
Ministres, ils font un excellent travail. Le taux de croissance, c'est-à-dire la
croissance de la richesse dans notre pays s'améliore, l'inflation est très
basse, ce n'est pas partout le cas en Afrique, nous avons un taux d'inflation
d'à peu près 2%, les pays environnants comme le Ghana sont à 9 ou10%, le Nigeria
la même chose. Nous avons pris des mesures énergiques pour régler les problèmes
de la cherté du coût de la vie, nous n'avons pas totalement réussi, mais nous
allons continuer parce que nous tenons à préserver le pouvoir d'achat de nos
concitoyens. Toux ces grands investissements ont pour objectif de réduire le
chômage, notamment le chômage des jeunes, ce sont des chantiers importants. Les
femmes, pendant cette rencontre avec la population, j'ai indiqué que la Première
Dame, Dominique Ouattara va mettre en place à la  mi-décembre, un système de
microcrédits qui permettra aux femmes d'avoir un crédit de 30.000 à 1million de
FCFA. Elle met en place un fonds initial  de 1 milliard de FCFA, ce n'est quand
même pas mal et le taux d'intérêt ne serait que de 12% alors que les autres
systèmes de microcrédit prennent des taux entre 25 et 30%. Donc, nous avons
l'ambition de faire en sorte qu'au-delà du rassemblement des Ivoiriens comme
vous l'avez dit, de l'image de la Côte d'Ivoire dans la sous-région, mon
ambition de construire une grande Nation demeure. Nous avons 24-25 millions
d'habitants, mais vous savez, des pays comme Israël n'ont pas plus de 10
millions d'habitants pourtant ce sont de grandes Nations. Moi, je veux que la
Côte d'Ivoire soit une grande Nation. Mon mandat je le place sous cette ambition
et avec tous, je pense que je pourrais y arriver. Maintenant pour parler de la
CEDEAO, si la Côte d'Ivoire retrouve cette place qu'elle avait il y a 15-20 ans,
cela veut dire que nous sommes entrain d'aller vers l'objectif recherché et ce
n'est pas donc étonnant que mes pairs m'aient demandé en février 2012, de
prendre la Présidence de la CEDEAO. A vrai dire, je n'étais pas tout à fait
favorable, mais le Président Jonathan Goodluck du Nigeria m'a relancé trois fois
pour le faire et j'ai accepté par solidarité. Mais c'est dire aussi que la Côte
d'Ivoire, non seulement est fréquentable mais les uns et les autres pensent que
nous pouvons apporter quelque chose et j'ai accepté de le faire et manque de pot
pour moi, j'ai été porté à la tête de la CEDEAO en février et voilà qu'en mars,
il y a le problème du Mali et en avril, le problème de la Guinée Bissau. La
satisfaction que je tire, c'est d'apporter ma contribution sur des dossiers
aussi brûlants pour notre sous-région mais je vois que les choses avancent et
que l'ordre constitutionnel a été rétabli dans les deux pays. Nous sommes
entrain de travailler à mobiliser la communauté internationale au plan militaire
comme au plan financier et au plan diplomatique. Donc les choses avancent, ce ne
sont pas des dossiers faciles, ce sont des dossiers qui me prennent beaucoup de
temps, mes pairs me demandent de faire une deuxième année de Présidence,
évidemment ce sont des questions que nous allons examiner en février prochain,
mais c'est une charge très lourde. J'ai besoin de continuer de montrer que la
Côte d'Ivoire se relève de sa léthargie de son isolement et j'ai aussi besoin de
me concentrer sur les problèmes des Ivoiriens.




 




RADIO Côte d'Ivoire : Nous
arrivons au terme de cette interview. M. le Président de la République, ONUCI FM
et RADIO CI vous disent merci de leur avoir accordé cette interview.




 




Le Président de la
République, Alassane Ouattara
:

Je vous remercie madame, je remercie  bien sûr notre radio, je remercie ONUCI FM
et je peux vous dire que tous les matins j'écoute et ONUCI FM et Radio CI. Vous
faites du très bon travail et je vous encourage à continuer.