LE REPRESENTANT DE L’OMS, DR. ALLARANGAR YOKUIDE, FAIT LE DE LA SITUATION EPIDEMIOLOGIQUE DE LA POLIOMYELITE EN COTE D’IVOIRE

31 mai 2013

LE REPRESENTANT DE L’OMS, DR. ALLARANGAR YOKUIDE, FAIT LE DE LA SITUATION EPIDEMIOLOGIQUE DE LA POLIOMYELITE EN COTE D’IVOIRE

Dans le cadre du lancement de la campagne nationale de la vaccination contre la poliomyélite, le 24 mai 2013, le Représentant de l'OMS, Dr. Allarangar Yokuidé, invité du point de presse hebdomadaire de l'ONUCI, du 23 mai 2013, a fait le point de la situation épidémiologique de la poliomyélite en Côte d'Ivoire, en Afrique et dans le monde. Il a parlé des résultats du premier passage des Journées Nationales de Vaccination (JNV), des objectifs de ce deuxième passage des JNV et des défis, de la stratégie régionale et des appuis de l'OMS à la campagne avant de se prêter aux questions des journalistes.



Dr. Allarangar Yokouidé (Représentant de l'Organisation Mondiale de la Santé en Côte d'Ivoire): le 24 mai 2013, le Ministère de la santé, de la lutte contre le VIH Sida pour la Côte d'Ivoire, lance la Campagne nationale de vaccination contre la poliomyélite sur toute l'étendue du territoire. Cette campagne sera organisée avec l'appui des partenaires de l'initiative mondiale pour l'éradication de la poliomyélite à savoir l'OMS, l'Unicef, le Rotary international et le CDC Atlanta. Cette campagne va durer quatre jours, donc du 24 au 27 mai 2013. La cible de cette campagne : il s'agit des enfants de 0 à 5 ans. Cette campagne va viser environ 7 500 000 enfants de 0 à 5 ans.

L'objectif de cette deuxième campagne de l'année 2013, c'est surtout de consolider les acquis de l'année 2012, qui a été déclarée par la communauté internationale l'année urgence polio dans tous les pays où il y a encore la nécessité de faire campagne.

Le deuxième objectif de cette campagne également c'est de prévenir le risque d'importation de ce virus de la poliomyelite en Côte d'Ivoire. Comme vous le savez, il y a encore des pays où le poliovirus sauvage continue de circuler et dans notre sous région nous avons par exemple le Nigéria, où on note encore des cas de poliovirus sauvage. Mais en dehors de l'Afrique, il y a également l'Afghanistan et le Pakistan. Je disais que cette campagne qui commence demain est la deuxième de l'année 2013. Du 26 au 29 avril 2013, il y a eu la première campagne ; et cette campagne a permis de vacciner 99% des enfants ciblés. C'est ce que l'on appelle la couverture administrative. Pour être sûr que les enfants ont été effectivement couverts, il y a eu un monitorage indépendant. Des moniteurs indépendants qui ont fait une enquête et ce monitorage a montré qu'il y a 95% des enfants qui ont été effectivement vaccinés. Et cela prouve à suffisance que les enfants ont été, effectivement, bien vaccinés. Sur le plan épidémiologique, la situation épidémiologique se présente comme suit :

En Côte d'Ivoire, depuis juillet 2011 jusqu'aujourd'hui, nous n'avons pas enregistré un seul cas de poliovirus sauvage. Cela est dû notamment à l'effort d'augmentation de la couverture par les semaines d'intensification de la vaccination. L'année dernière, le Ministère de la santé a pris une décision et une fois par mois, toute une semaine est consacrée à l'intensification de la vaccination de routine, et cela a donné des fruits. Il y a également la qualité des Journées nationales qui ont été organisées en 2012. Cela peut être également mis dans le bénéfice de la situation et l'efficacité de la surveillance épidémiologique. En Afrique, du 1er janvier au 14 mai 2013, nous avons enregistré 22 cas de poliovirus. Les 22 cas proviennent que du Nigeria. Pour le monde, nous avons à ce jour 33 cas qui sont répartis comme suit : le Pakistan, 8 cas ; on a enregistré 2 cas pour l'Afghanistan ; 22 cas au Nigeria et 1 cas enregistré en Somalie. Pour la campagne, il y a des stratégies adaptées qui ont été mises en place, non seulement cette année mais aussi depuis l'année dernière. Il s'agit de la vaccination synchronisée.

Pour cette campagne qui va démarrer demain, il y a 12 pays de la sous région qui vont faire ces mêmes campagnes. Sur ces 12 pays, il y en a 5 qui font frontière avec la Côte d'Ivoire. Il s'agit notamment du Libéria, de la Guinée, du Mali, du Burkina-Faso et du Ghana. L'objectif de cette synchronisation est surtout de maximiser les chances de vacciner tous les enfants. Vous savez qu'au niveau des frontières il y a toujours des va et vient. Pour ne pas risquer que certains enfants échappent, cette stratégie vise donc à pouvoir vacciner tous les enfants qui peuvent passer d'un côté comme de l'autre. Par rapport à la couverture en matière de vaccination dans le Programme élargi de vaccination (Pev) de routine en Côte d'Ivoire, la situation est très encourageante. Puisque pour la troisième dose de vaccin Polio oral, nous sommes en Côte d'Ivoire à 97%. Et pour la troisième de pentavalent, nous sommes à 98%. Pour la rougeole, nous sommes à 96%. Et pour la fièvre jaune, nous sommes à 89%. Je dirais donc que la situation est très reluisante, mais il faut dire que c'est une situation très sensible et très fragile, parce que pour la campagne d'avril 2013, il y a eu beaucoup d'enfants qui ont eu pour la première fois le vaccin polio. Cela ne devait pas arriver. Puisque l'intervalle entre les campagnes, c'est moins de 6 mois, normalement on ne devrait pas avoir des enfants de 6 mois qui échappent à cette campagne là. Alors que pour la campagne du mois d'avril on a eu environ 250 000 enfants qui ont eu pour la 1ere fois le vaccin. C'est pour cela que nous disons que c'est une situation très sensible, il faut qu'on ait ça en tête.



L'enjeu de cette campagne, c'est d'abord qu'il faut qu'on fasse tout pour éviter d'avoir des enfants paralysés, et surtout paralysés à cause de la poliomyélite. Nous avons pourtant la possibilité d'éviter cela. C'est cela l'enjeu sanitaire. Et si nous arrivons à éradiquer la polio, cela veut dire que la Côte d'Ivoire va être débarrassée de cette maladie. Et pour parler finance, je vous dirais que pour l'organisation d'un passage des Journées nationales de vaccination, on dépense plus d'un milliard de francs CFA, ce que met le Gouvernement de Côte d'Ivoire, ce que met Rotary international, ce que met l'Unicef, ce que met l'OMS, ce que met le CDC Atlanta, réunis, cela fait plus d'un milliard. Alors, si nous arrivons à éradiquer la poliomyélite, ça veut dire que cette somme là peut être introduite dans d'autres programmes de santé. En plus de cela, ce que je pourrais vous dire, c'est de vous parler de l'apport ou de l'appui de l'OMS dans ces campagnes là. Pour chaque passage, l'OMS recrute environ 200 personnes supplémentaires pour donner un appui technique. Il s'agit notamment des superviseurs nationaux, il s'agit de moniteurs indépendants, de consultants nationaux et internationaux. Ce que nous visons, c'est par exemple les activités transfrontalières. Tout à l'heure je vous avais parlé des personnes qui font les va et vient au niveau des frontières. Au niveau des activités transfrontalières, on fait en sorte qu'au niveau des frontières, les choses se passent en même temps des deux côtés ; de sorte que si un enfant se retrouve d'un côté comme de l'autre, on a la chance d'avoir cet enfant là vacciné. Les enfants de l'OMS visent dons cette activité là. Nous avons également ce que nous appelons les sites de regroupement. Il y a par exemple les marchés. Une maman ne peut pas aller au marché et laisser son enfant à la maison. Les enfants se retrouvent avec leur maman au marché. Il y a les gares routières, quand la maman voyage, l'enfant est avec la maman. Il ya les corridors. Nous mettons un accent particulier sur ces sites de regroupement pour pouvoir vacciner les enfants qui se retrouvent avec leur maman dans ces endroits là. Je vais vous donner un exemple concret de ce que nous avons vécu au mois d'avril 2013. Nous avons mis des consultants dans ces endroits là et rien que pour ces endroits, ces consultants ont réussi a vacciner plus de 70 000 enfants. Et nous nous sommes dits, si nous n'avions pas fait cela, et même si on a réussi à vacciner certains de ces enfants, c'est sûr que la moitié, ou une bonne partie de ces enfants ne seraient pas vaccinés. L'autre volet également, c'est le monitorage indépendant. Quand on parle d'une activité de qualité, il faut une vérification et pour faire cette vérification, nous essayons de faire en sorte qu'il y ait un œil extérieur qui essaie de voir si l'activité que nous sommes en train de faire est en train d'être bien faite. En matière de logistique, l'OMS, à chaque passage, loue environ 150 véhicules pour les mettre à la disposition du district sanitaire pour l'envoi de tous les collègues que nous recrutons pour aller aider les districts sanitaires. Mais pour faire marcher la logistique, il faut bien sur du carburant. Et pour chaque passage l'OMS paye aux alentours de 20 à 25 millions voire plus, de carburant pour pouvoir organiser ces campagnes. Bien sûr quand on fait ces campagnes, il y a les marquages des maisons, il faut donc de la craie, le marquage des enfants, il faut des marqueurs indélébiles, sans compter l'appui financier que nous donnons pour les coûts des opérations.



Pour terminer, je voudrais dire que le vaccin polio, le vaccin oral est sans danger parce que c'est un vaccin qui est garanti par l'OMS. Des rumeurs courent pour dire que ce vaccin peut donner des diarrhées, des anémies. Ce qui est totalement faux. Le Ministre de la Santé a insisté à chaque reprise là-dessus. Mais je reviens là-dessus pour dire que ce vaccin est sans danger. J'en appelle donc à tous les papas, à toutes les mamans pour faire vacciner tous les enfants au cours de ce passage. C'est l'opportunité pour nous, pour la Côte d'Ivoire d'être au rendez vous de l'éradication de la poliomyélite. Comme je le disais au début, depuis juillet 2011, la Côte d'Ivoire n'a pas eu un seul cas de poliovirus sauvage. Nous sommes à la 2e année et pour être éligible comme pays indemne de la polio, il faut au moins trois années de suite et je crois que la Côte d'Ivoire doit maintenir les efforts actuels pour pouvoir être au rendez vous de l'éradication de la poliomyélite. Je vous remercie.



Tenin Bê Ousmane (Quotidien Nord Sud) : Lors d'un passage de vaccination, j'ai rencontré un parent qui a témoigné que ses enfants, après avoir reçu les gouttes de vaccin, ont connu une fièvre. Il avait totalement refusé que ses enfants se fassent vacciner. Il avait même caché les enfants. C'est un témoignage que j'ai vécu. Je voudrais demander est ce qu'il n'y a pas d'effets indésirables de ces vaccins ?{



Dr. A Y : Je reviens sur ce que j'ai dit tout à l'heure en conclusion. En réalité c'est un vaccin avec une innocuité totale. Vous savez, nous vivons dans un environnement où nous avons plusieurs pathologies qui peuvent sévir. Peut-être que les enfants ont eu le vaccin au moment où il y avait déjà une maladie qui couvait. Cela se voit fréquemment. Un enfant peut commencer à faire un palu, il va recevoir le vaccin et puis après le palu se déclenche et on dira que c'est le vaccin qui a donné la fièvre. Non ! Je pense que si ce vaccin avait vraiment des effets indésirables, je peux vous dire que nous aurions déjà arrêté de faire la vaccination avec ce vaccin. Vous savez, rien que pour la Côte d'Ivoire, en 2011, il y a eu 7 passages. L'année dernière en 2012, il y a eu 4 passages. Alors si le vaccin avait effectivement des problèmes, en multipliant 7 passages par 7 000 000 d'enfants, ou encore en multipliant 4 passages par 7 500 000 enfants, je pense qu'il y aurait plusieurs enfants qui auraient eu des effets indésirables. Ce n'est pas le cas. Je peux vous assurer qu'il ne faut pas que les parents disent que le vaccin a donné ceci ou le vaccin a donné cela pour pouvoir cacher les enfants. Non ! Vraiment, je dis et je le répète en matière de polio, aussi longtemps qu'un seul enfant va continuer d'héberger le virus, tous les autres enfants sont à risques. Parce qu'à partir d'un seul enfant qui n'est pas vacciné, qui continue d'héberger le virus, la situation peut repartir.



KL : Merci Dr. Allarangar.