Commissaire Vianney Nshimiyimana : « Au 30 avril 2017, il n’y aura plus de policiers des Nations Unies en Côte d’Ivoire »
Après deux ans et demi passés en Côte d’Ivoire, le Chef de la Police de l’ONUCI (UNPOL) s’apprête à quitter le pays. Dans une interview accordée à ONUCI FM, il fait le point de la collaboration entre les Polices ivoirienne et onusienne ; parle du transfert des responsabilités, du retrait progressif de la Police de l’ONUCI du pays et de son expérience en Côte d’Ivoire.
ONUCI FM : Commissaire Vianney Nshimiyimana, bonjour !
Commissaire Vianney Nshimiyimana : Bonjour
ONUCI FM : Deux ans et demi en qualité de Chef de la composante Police au sein de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) : comment a été la collaboration entre la Police des Nations Unies (UNPOL) et celle de la Côte d’Ivoire ?
Commissaire V.N. : La collaboration a été excellente. La Police onusienne est là pour soutenir, renforcer les capacités de la Police ivoirienne et on ne peut pas le faire sans leur consentement. Il y avait un soutien opérationnel, un soutien en renforcement des capacités et la collaboration a été toujours bonne.
ONUCI FM : Pouvez-vous nous parler brièvement des grandes articulations de cette collaboration ?
Commissaire V.N. : Dans le domaine de l’appui opérationnel, nous avons soutenu la Police nationale dans les opérations de maintien de l’ordre, pendant le processus électoral, en 2015 par exemple ; où nous les avons soutenus au cours des différents meetings tenus par différents candidats, le jour J et même après.
Dans le renforcement des capacités aussi, nous les avons formés ; nous avons conduit des exercices conjoints avec nos unités constituées des FPU (NDLR : Forces de Police Unifiées) pour le maintien de l’ordre. Nous les avons formés en matière de police judiciaire, de police scientifique, dans la police de roulage ; des actions que nous avons menées ensemble dans le renforcement des capacités. Nous avons eu à les soutenir dans la sécurisation…Ce sont là quelques exemples.
ONUCI FM : Vous allez bientôt quitter la Côte d’Ivoire. Comment le transfert de compétences va se faire entre la Police onusienne et la Police ivoirienne ?
Commissaire V.N. : Le transfert a été planifié et programmé. La fin de la Mission est certaine avec la Résolution 2284 (2016). Moi je vais quitter bientôt, mais en laissant derrière moi des plans de transition ainsi que de transfert de responsabilités. Madame la Représentante spéciale a écrit à toutes les Institutions, leur indiquant la fin de la Mission et leur demandant de designer des points focaux pour que l’on puisse planifier ce transfert de responsabilités. À notre niveau, nous avons été désignés comme point focal de la Police onusienne qui représente la Mission, mais aussi au niveau de la Police locale et de la Gendarmerie, ils ont désigné des points focaux. Nous avons eu des réunions conjointes pour planifier ce transfert de responsabilités et nous nous sommes convenus d’un calendrier bien connu.
ONUCI FM : La réduction des effectifs est planifiée. À ce jour, combien d’éléments y a-t-il et comment cela va se faire jusqu’à la fin de la Mission onusienne ?
Commissaire V.N. : A ce jour, les effectifs qui sont approuvés par le Conseil de sécurité, ce sont 420 staffs de Police FPU et 500 de police individuelle. Mais, nous allons procéder à une diminution progressive jusqu’au mois de décembre où il ne restera plus que 250 policiers individuels et 420 éléments d’Unités de police constitués (FPU). À partir du mois de décembre, on va encore diminuer jusqu’ à la fin de nos opérations qui est prévue le 30 mars - ce sera la fin des opérations de la Police - et au mois d’avril, ce sera le retrait de tous les effectifs restants. Au 30 avril 2017, il n’y aura plus de policiers des Nations Unies ici en Côte d’Ivoire.
ONUCI FM : Pensez-vous que la Police ivoirienne soit suffisamment formée et outillée pour la relève ?
Commissaire V.N. : Oui, je crois bien et ils l’ont suffisamment démontré pendant la sécurisation de l’élection présidentielle de 2015. Nous les avons soutenus dans la planification. Nous étions repositionnés pour intervenir en cas de besoin, mais ce sont eux-mêmes qui ont fait le travail en sécurisant l’élection et celle-ci s’est passée sans incidents. Actuellement, il y a le problème du terrorisme qui menace tout le monde, ailleurs comme ici ; cela s’est passé à Grand-Bassam. On ne peut pas dire qu’il n’existe pas de système qui n’ait pas de failles, mais la Police ivoirienne est, à mon avis, à la hauteur de la tâche. Plus tard, en cas de besoin, ils pourront passer par le PNUD (NDLR : Programme des Nations Unies pour le Développement). Et puis, il y aussi le Standing Capacity Police de Brindisi qui peut toujours intervenir.
ONUCI FM : En termes de droits humains, quelques rapports notent des failles…
Commissaire V.N. : Il y a des éléments qui font partie des institutions et qui peuvent violer certains droits de l’Homme, mais ce n’est pas toute la Police ; ce n’est pas la volonté de la hiérarchie de la Police ou même des dirigeants politiques. Comme dans tous les pays, vous pouvez avoir une bonne politique, une bonne stratégie mais certains éléments peuvent faire des fois entorse à leurs obligations policières. Mais ceci n’est pas spécifique à la Côte d’Ivoire.
ONUCI FM : Vous quittez la Côte d’Ivoire très bientôt. Est-ce que vous avez des recommandations, des propositions à faire ?
Commissaire V.N. : Nous avons acquis une expérience pendant les deux ans et demi passées en Côte d’Ivoire. J’ai tout consigné dans mon rapport de fin de mission. Peut-être, à titre d’exemple, si nous avons pu conduire l’élection présidentielle qui s’est bien passée, c’est une expérience à partager avec les autres missions. L’autre expérience que j’aimerais partager avec les autres, c’est ma participation à cette transition, à la planification de cette fin de mission. C’est une expérience dont pourraient bénéficier des missions des Nations Unies.
Dans le cadre de la préparation des élections pacifiques, sans incidents, nous avons constitué un réseau d’honorables correspondants qui nous informaient pour que nous puissions adopter une posture proactive. Ça aussi, c’est une autre expérience que j’aimerais partager avec les autres misions.
ONUCI FM : Commissaire Vianney Nshimiyimana, je vous remercie.
Propos recueillis par Boni Kabie et retranscrits par Marie-Mactar Niang