RFI - Edition de 6 heures 30

█ Les violences se poursuivent dans l'ouest du pays [Côte d'Ivoire] après la prise par les forces nouvelles de Toulepleu. Les ex-rebelles, alliés à Alassane Ouattara, affrontaient toujours hier les troupes fidèles à Laurent Gbagbo aux environs de Bloléquin à quelques dizaines de kilomètres de là. Des violences qui continuent de provoquer l'exode des civils. Selon l'ONU, 200.000 personnes auraient ainsi fui leurs maisons pour échapper aux affrontements à Abidjan. Et plus de 70.000 auraient également traversé la frontière vers le Liberia. Jacques Franquin est le représentant en Côte d'Ivoire du haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés.

Jacques Franquin : Nous comptons déjà à peu près 70.000 personnes déplacées sur l'ouest. Suite à la prise de Toulepleu, nous sommes probablement à 4 ou 5.000 de plus, sans parler de la crise humanitaire qui se déroule ici à Abidjan suite aux combats féroces qui ont eu lieu à Abobo, il y a dix jours à peu près. Plus de 200.000 personnes, peut être même 300.000 sont déplacées ici même à Abidjan et dans les environs immédiats d'Abidjan. Nos collègues du Liberia estimaient, il y a quelques jours, à peu près 75.000 le nombre d'Ivoiriens qui sont arrivés au Liberia. Mais le côté le plus dramatique est probablement les personnes déplacées à l'intérieur du pays. Et certains avec tous leurs biens qui ont été brûlés.

RFI : Jacques Franquin est ce que la communauté internationale a pris selon vous la mesure du drame qui se joue en Côte d'Ivoire ?

Jacques Franquin : Non certainement pas. J'ai parfois aussi l'impression que les ivoiriens eux-mêmes ne se rendent pas compte de la crise qui se dessine devant eux. A Abidjan, dans certains quartiers, on continue à vivre normalement sans se rendre compte que les vivres et les ressources commencent à manquer un peu partout. Et que nous sommes aux portes d'une très grave crise où les premières victimes seront les plus pauvres, bien évidemment.

Jacques Franquin, représentant du HCR en Côte d'Ivoire, invité d'Edmond Sadaka, hier soir sur notre antenne.

█ La bataille qui oppose Alassane Ouattara à Laurent Gbagbo, en Côte d'Ivoire est aussi économique. Hier, le Président sortant a annoncé la prise de contrôle par l'Etat de l'achat et de l'exportation du cacao, dont le pays est le premier producteur mondial. Une décision qui vise à contrer la paralysie de la filière. Paralysie provoquée notamment par les sanctions européennes et en particulier l'embargo sur les ports d'Abidjan et San Pedro. Fin janvier, Alassane Ouattara, le Président élu, reconnu par la communauté internationale, avait ordonné l'arrêt des exportations de cacao pour asphyxier économiquement le gouvernement de son rival.