Ndolamb Ngokwey: « le bilan montre une amélioration de la situation humanitaire en Côte d’Ivoire »

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19 nov 2013

Ndolamb Ngokwey: « le bilan montre une amélioration de la situation humanitaire en Côte d’Ivoire »

{L'ancien Représentant spécial adjoint du Secrétaire général de l'ONU, Représentant du PNUD en Côte d'Ivoire, Coordonnateur résident du Système des Nations Unies et Coordonnateur humanitaire, Ndolamb Ngokwey, de la République Démocratique du Congo, a quitté la Côte d'Ivoire, le samedi 16 novembre 2013 après un mandat de plus de trois ans. Il est remplacé par M'Baye Babacar Cissé du Sénégal. Le Secrétaire général, Ban Ki-moon, a remercié M. Ngokwey pour les services rendus au cours de son mandat en Côte d'Ivoire et pour sa contribution à l'amélioration de la coordination du système des Nations Unies dans ce pays.}



{Avant son départ, Ndolamb Ngokwey a accordé une interview à la radio des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI FM).}



ONUCI FM: Monsieur Ndolamb Ngokwey, bonjour !



Ndolamb Ngokwey: Bonjour



ONUCI FM: Dans quel état d'esprit quittez-vous la Côte d'Ivoire ?



Ndolamb Ngokwey : Je quitte la Côte d'Ivoire dans un état d'esprit ambivalent parce qu'il y a d'une part, la tristesse d'abandonner des collègues, de quitter des amis, il y a la tristesse de quitter un pays qu'on a appris à aimer, de quitter des Ivoiriens qu'on a appris à aimer aussi, mais il y a en même temps la joie d'ouvrir une nouvelle page de l'histoire personnelle.



ONUCI FM: Quel bilan faites-vous de ce passage en Côte d'Ivoire ?



Ndolamb Ngokwey : J'ai passé trois ans et demi en Côte d'Ivoire. C'est un bilan qui montre une amélioration de la situation humanitaire

puisqu'aujourd'hui, on ne peut plus parler de crise humanitaire en Côte d'Ivoire, même s'il y a encore des besoins résiduels humanitaires, même s'il y a encore des poches de vulnérabilité. Mais la grande urgence humanitaire a été bien gérée par les Ivoiriens, par les autorités ivoiriennes avec l'appui de leurs partenaires internationaux.



ONUCI FM: Vous avez dit qu'il y a encore des poches résiduelles. Quels sont les domaines dans lesquels il faudrait mettre l'accent ?



Ndolamb Ngokwey : Il s'agit d'abord de faciliter l'accès aux services sociaux de base dans les régions où les personnes sont retournées; il s'agit d'améliorer l'accès à l'éducation, l'accès à la santé, l'accès à l'eau potable et à l'assainissement et l'accès à la nutrition



ONUCI FM: Est-ce qu'il y a des régions qui sont beaucoup plus sensibles que d'autres ? On a souvent parlé de l'Ouest, est-ce que l'Ouest reste une région très sensible du point de vue humanitaire ?



Ndolamb Ngokwey : Oui, c'est vrai que l'Ouest a retenu l'attention des acteurs humanitaires, mais il n'y a pas que l'Ouest puisqu'il y a eu aussi des interventions ailleurs ; ici même à Abidjan. Et de plus en plus, les acteurs humanitaires se focalisent sur le Nord qui a des problèmes nutritionnels assez importants, particulièrement chez les enfants et chez les femmes enceintes.



ONUCI FM: On est dans une phase de réforme en Côte d'Ivoire. Il y a la réforme de la défense, il y a la RSS (NDLR : Réforme du Secteur de la Sécurité), ce sont des réformes qui demandent beaucoup de financement. Que pouvez-vous conseiller aux autorités ivoiriennes pour pouvoir boucler ce genre de financement ?



Ndolamb Ngokwey : Ce sont les autorités ivoiriennes elles-mêmes qui ont initié ces réformes, ce sont elles qui ont mis en place le mécanisme et les structures pour mener à bien ces réformes. La Communauté internationale, y compris le Système des Nations Unies, joue un rôle d'accompagnement et parfois un rôle d'assistance technique. Tout ce que je peux conseiller – je ne dirai même pas conseiller, parce que les choses se font - tout ce que je peux indiquer, c'est la nécessité de garder l'élan, de garder le momentum, de continuer et d'approfondir ces réformes. Ces réformes sont voulues par l'Etat ; ces réformes sont importantes pour le pays, ces réformes feront la différence pour la sécurité et le bien-être de la population.



ONUCI FM: Pouvez nous dire un mot sur le processus de réconciliation nationale ? Quel regard portez-vous sur ce processus au moment de partir ?



Ndolamb Ngokwey : Vous faites bien de parler de processus, pour insister donc sur le fait que ce n'est pas quelque chose qui se fait en un jour, en un mois ou même en une année. C'est un processus de longue haleine qui implique un changement de mentalité, qui implique un changement d'attitude et qui implique une remise en question personnelle. La réconciliation se fait à plusieurs niveaux : au niveau des Institutions, au niveau des structures mais le moteur de la réconciliation, c'est ce qui se passe au niveau des personnes humaines, qu'il s'agisse d'hommes et de femmes politiques, de chefs traditionnels ou de chefs religieux ou de simples voisins. Je plaide pour cette réconciliation de proximité.



C'est vrai qu'il y a parfois des impatiences face à ce que les gens peuvent percevoir comme des lenteurs mais si la direction est bonne, si la démarche va dans le bon sens, il faut toujours continuer à renforcer cette dynamique. Je crois qu'il est important que la réconciliation demeure au cœur des priorités ; la réconciliation comme pratique quotidienne, pas seulement d'hommes politiques, mais aussi, des Ivoiriens ordinaires.





ONUCI FM: M. Ndolamb, pour terminer, quel souvenir garderez vous de votre passage en Côte d'Ivoire?



Ndolamb Ngokwey : Je garderai le souvenir d'un pays qui est en train de retrouver sa place, d'un pays, qui après une période de turbulence, est en train de tirer les leçons de cette période pour aller résolument vers l'avant et reconstruire cette nation, cette terre d'espérance pour l'humanité.



Je garderai le souvenir de ces Ivoiriens que j'ai vu au plus fort de la crise humanitaire faire montre de solidarité, de générosité envers leurs concitoyens, quels que soient leurs bords politiques, religieux ou ethniques. Je garderai le souvenir de la joie des Ivoiriens, le souvenir de leur humour, le souvenir de leur fierté d'être Ivoiriens qui est en fait une fierté dont tous les Africains sont fiers aussi.



ONUCI FM: M. Ndolamb Ngokwey, merci.



Ndolamb Ngokwey : Merci à vous !



{Propos recueillis par Souleymane Katié Ouattara}