DECLARATION SUR LA CERTIFICATION PARTIELLE DES ELECTIONS LEGISLATIVES EN CÔTE D’IVOIRE

9 mar 2012

DECLARATION SUR LA CERTIFICATION PARTIELLE DES ELECTIONS LEGISLATIVES EN CÔTE D’IVOIRE







 




1.    
Le 17 février dernier,


conformément à mon mandat tel que défini dans la Résolution 1765 (2007) du
Conseil de sécurité des Nations Unies, j'ai


procédé

à la
certification partielle d
es élections législatives du 11 décembre
2011. J'ai indiqué à cette occasion que, dans les 193 circonscriptions
électorales dont le scrutin a été validé par la CEI puis par le Conseil
constitutionnel, les élections législatives, au regard des critères d'évaluation
pour la certification, ont été ouvertes, libres, régulières et transparentes et
conformes aux normes internationales existant en la matière.




 




2.    
Pour 66 circonscriptions dont les élections ont fait l'objet d'un
contentieux, j'ai procédé à un examen minutieux des copies des recours qui me
sont adressées. Mon évaluation de chacune des étapes de l'élection dans chacune
de ces circonscriptions m'avait conforté dans l'idée que le traitement par le
Conseil constitutionnel des requêtes les concernant a pris en compte la réalité
des faits et le respect des normes et procédures en vigueur. Cette évaluation
recoupe les conclusions présentées par le Président du Conseil le 31 janvier
2012 lors d'un point de presse et confirmant, d'une part les résultats proclamés
par la CEI pour
55
circonscriptions électorales et annulant, d'autre part ceux de 11 autres
circonscriptions électorales.




 




3.    
Pour ces 11
circonscriptions, auxquelles s'ajoute la circonscription n°195, la reprise du
scrutin, organisée par la CEI, a eu lieu le 26 février 2012, tel que fixé par le
gouvernement, sur proposition de

la CEI.




 




4. 
Il faut rappeler que la Certification des élections en Côte d'Ivoire est
née de la volonté des acteurs politiques ivoiriens de voir une autorité experte
et extérieure accompagner et surveiller les élections de sortie de crise. Dans
l'Accord de Pretoria du 06 avril 2005, ils ont invité les Nations unies à
prendre part aux travaux de la Commission Electorale Indépendante (CEI) « en
vue d'assurer l'organisation d'élections libres, justes et transparentes
. »
A cet effet, le Médiateur de l'époque, le Président sud africain, Thabo Mbeki, a
adressé une requête aux Nations Unies, au nom du peuple ivoirien. Le 04 mars
2007, la médiation entreprise par la Communauté Economique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) aboutit à la signature de l'Accord Politique de
Ouagadougou (APO), faisant expressément référence à l'Accord de Pretoria.



 




5. 
Par la suite, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, le 16
juillet 2007, la Résolution 1765. Cette résolution endosse l'APO et confie au
Représentant Spécial du Secrétaire Général (RSSG) en Côte d'Ivoire, le mandat de
« certifier que tous les stades du processus électoral fourniront toutes les
garanties nécessaires pour la tenue d'élections présidentielle et législatives
ouvertes, libres, justes et transparentes, conformément aux normes
internationales
. » Ce mandat est réitéré dans la Résolution
2000 (2011) du Conseil de sécurité qui « réaffirme
que le RSSG devra
garantir que toutes les conditions nécessaires à
la tenue d'élections ouvertes, libres, régulières et transparentes sont réunies
à toutes les étapes des élections législatives à venir, conformément aux normes
internationales et aux critères arrêtés d'un commun accord.
 »




 




6. 
La régularité et la transparence des élections et leur conformité aux
normes internationales et aux critères arrêtés d'un commun accord sont évaluées
sur la base de cinq (05) critères-cadre de certification : la paix, l'inclusion,
les médias d'Etat, la liste électorale et les résultats. Ces critères ont été
développés par l'ONUCI, en concertation avec les parties prenantes ivoiriennes
et le Facilitateur de l'APO, puis consignés plus tard au paragraphe 32 du 16e
Rapport (S/2008/250) du Secrétaire Général des Nations Unies sur l'Opération des
Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI).




 



AU TITRE DU
CRITERE
« PAIX »                                                                                                                                     
                                         



 




7.    
L'évaluation de ce critère repose notamment sur le suivi de la liberté de
mouvement et d'expression, l'absence de violence et la non-intimidation des
populations par les forces de l'ordre, les médias d'Etat et les autres acteurs.
Cela signifie que le processus électoral doit se dérouler dans un climat apaisé.




 




8.    
Dans le cadre de la certification, l'ONUCI a attentivement suivi et
évalué, y compris au plan sécuritaire, les différentes étapes des élections
législatives partielles de février dernier, en particulier la campagne
électorale, le scrutin, les opérations de dépouillement des votes, la
proclamation des résultats par la CEI et le règlement des contentieux par le
Conseil Constitutionnel.



 




9. 
D'emblée, je me réjouis de l'attitude pacifique du peuple ivoirien qui,
quelques mois seulement après la crise postélectorale, a démontré une maturité
politique et citoyenne remarquable.



 




10.
Sur la base des rapports des équipes de l'ONUCI, ainsi que de ceux des
missions d'observation nationales déployées sur le terrain, je puis déclarer que
le scrutin du 26 février 2012 s'est tenu dans
un calme général, et dans
des conditions conformes aux normes d'une élection libre, ouverte et
transparente.
La présence d'un dispositif sécuritaire de 35.000 éléments
annoncés par le Gouvernement et comprenant les Forces Républicaines de la Côte
d'Ivoire (FRCI), la gendarmerie et la police nationale, appuyés par plus de 3000
casques bleus, a largement contribué à cet environnement globalement sécurisé.



 





11.
Quelques
incidents graves
, mais isolés, ont toutefois été relevés après la
clôture du scrutin,
en particulier dans les
circonscriptions  n° 091
(Facobly, Guezon, Koua, Semien, Tieny-Seably
Communes et Sous-préfectures et
n°135 (Bonon, Zaguieta, Communes et Sous-préfectures). Pour ces
deux circonscriptions, la CEI a informé par Communiqué rendu public le 29
février que :




 





a)    
« A Bonon, l'on a déploré des morts par balles. La sécurité du bureau de
centralisation n'a pu être garantie de sorte que le processus de dépouillement,
de recensement
général
des votes et de proclamation provisoire des résultats du scrutin n'a pas été
achevé » ;





 




b)   

« A
Facobly, des urnes ont disparu et de nombreux bureaux de vote ont été saccagés.
Le
recensement général
des votes puis la proclamation provisoire des résultats à la Commission
électorale locale n'a pu se faire. »



 




12.
C'est le lieu pour moi de signifier aux populations que ceux qui usent de
la violence ne sauraient en tirer le moindre bénéfice électoral. Nous
continuerons à soutenir le gouvernement dans sa mission d'assurer le retour de
la paix et de la sécurité sur tout le territoire ivoirien.




 




13.
Pour le scrutin partiel du 26 février, soixante six (66) candidats ont pu
se présenter sur un nombre initial de soixante dix-neuf (79) retenus par la
CEI ; les treize (13) autres ayant retiré leur candidature.




 



S'AGISSANT DES
MEDIAS D'ETAT



 




14.                                                                                                                                                           
Le critère Médias d'Etat pose la nécessité pour les médias de service
public, en l'occurrence la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI), la Radio
Côte d'Ivoire (RCI) et le quotidien Fraternité Matin, de traiter l'information
politique avec impartialité et de garantir un traitement équitable et égal à
tous les candidats, partis et groupements politiques engagés dans le processus
électoral, plus particulièrement pendant la campagne électorale.




 




15.
Etape sensible du processus électoral, la campagne est régie par la loi,
en ce qui concerne notamment l'égalité et l'équité dans le traitement des
candidats par les organes de presse écrite et audiovisuels d'Etat. La loi est
complétée par le Code de bonne conduite des partis et groupements politiques et
candidats signés le 24 avril 2008 en présence du Secrétaire général des Nations
Unies.



 




16.
Pour ce scrutin, la campagne électorale a été menée du 18 au 24 février.



 




17.
A ce sujet, je dois faire observer que, tout comme pour le scrutin du 11
décembre 2011, les premiers jours de la campagne ont été marqués par une absence
de réglementation spécifique et précise quant à la diffusion des activités
politiques des candidats. Néanmoins, si pour le premier scrutin, des décisions
et des rappels à l'ordre de la part du Conseil National de la Presse (CNP) et de
la Haute Autorité de Communication Audiovisuelle (HACA), ont permis de redresser
la situation, pour le deuxième scrutin, ces organes de régulation des médias,
ont manqué de rappeler par voie de presse, les dispositions en vigueur devant
régir la couverture médiatique de ces élections. En conséquence, le traitement
des activités de certains candidats par les médias d'Etat a dérogé aux principes
d'impartialité, d'égalité et d'équilibre en ce qu'ils ont offert plus de
visibilité à certains candidats qu'à d'autres. Cependant, malgré un net
redressement
dans le sens
d'une meilleure répartition du temps d'antenne accordé aux différents candidats
,
en particulier par l
a RTI et
Radio Côte d'Ivoire
, la
couverture de la campagne est demeurée partiale, aussi bien par rapport aux
circonscriptions couvertes qu'aux candidats.




 




 





ENFIN,
POUR CE QUI EST DES RESULTATS




 




18.                                   
Au titre de ce critère, les résultats doivent être déterminés à l'issue
d'un dépouillement transparent, effectué sans délai excessif. Ils doivent être
acceptés de tous ou contestés de manière pacifique, par des voies appropriées.





 




19.

Je dois
faire observer que, pour une grande majorité des circonscriptions électorales,
les différentes opérations du scrutin se sont déroulées de manière
satisfaisante.
Le jour
du scrutin, j'ai personnellement conduit une délégation comprenant des membres
de l'ONUCI et du corps diplomatique pour m'imprégner du déroulement des
opérations de vote sur le terrain.



 





20.
Je reconnais l'existence de quelques dysfonctionnements d'ordre
logistique et organisationnel qui ont pu entraîner des retards à l'ouverture des
bureaux de vote et des perturbations dans le déroulement du scrutin. Je pense à
la distribution tardive du matériel électoral sensible, au retard d'arrivée de
certains membres de bureau de vote sur les lieux, à l'insuffisance de bulletins
de vote, au manque de sticker ou de PV  de dépouillement des votes etc.




 





21.
Le dépouillement des bulletins de vote s'est fait en présence des
représentants des candidats et/ou des partis politiques dans la plupart des
bureaux de vote. Les observateurs nationaux, notamment ceux de la Convention de
la Société Civile Ivoirienne (CSCI) ont couvert la quasi-totalité du territoire
et ont ainsi contribué à la transparence du scrutin.





 





22.
La phase d'acheminement des

PV vers leurs lieux d'agrégation s'est
partout bien déroulée, à l'exception de deux axes.




 




23.
Après les opérations, l'ONUCI a reçu de la CEI, dans le cadre de la
gestion des résultats, 941 procès-verbaux (PV) de bureaux de vote sur les 1011
attendus. Ces PV ont été minutieusement saisis, vérifiés et évalués à travers le
même dispositif technique et informatique mis en place lors du scrutin de
décembre dernier.



 




24.
Le 28 février, la CEI a proclamé les résultats provisoires pour dix (10)
circonscriptions électorales sur les douze (12) concernées.



 




25.
Le Conseil constitutionnel a été saisi de deux requêtes concernant les
circonscriptions n°084 (Ahouanou, Bacanda, Ebonou, Grand-Lahou, et Toukouzou,
Communes et Sous-préfectures) et n°195 (Bogouine, Logouale, Yapleu et Ziogouine,
Communes et Sous-préfectures). Il les a rejetées comme non fondées par décisions
du 07 mars 2012.




 




26.
Alors qu'on attendait l'issue du contentieux électoral, mais également le
démarrage d'une enquête suggérée par elle, la CEI a proclamé, le 07 mars 2012,
les résultats définitifs des élections législatives, y compris des partielles du
26 février 2012. Ces résultats concernent 253 sièges sur les 255 de la nouvelle
législature 2011-2016. Sur la base de cette proclamation, l'Assemblée
Nationale a été convoquée pour une première séance le 12 mars 2012. L'ONUCI a
reçu de la CEI les résultats de cette proclamation ainsi que les décisions du
Conseil constitutionnel le 08 mars 2012.



 




27.                                                                                                                                                           
Je considère qu'au regard des éléments pertinents d'évaluation sur la
base des cinq (5)  critère-cadres pour la certification, les élections
législatives dans les 10 circonscriptions électorales, objet de la proclamation
du 28 février, ont été tenues de manière ouverte, libre, juste et transparente,
conformément aux normes internationales.



 




28.
La CEI a informé par communiqué du 29 février que: « (...) le processus de
dépouillement, de recensement général des votes et de proclamation provisoire
des résultats du scrutin tel que prévu par l'article 86 du Code électoral n'a pu
être achevé » pour les circonscriptions
n° 091
(Facobly,
Guezon, Koua, Semien, Tieny-Seably Communes et Sous-préfectures et
n°135 (Bonon, Zaguieta, Communes et Sous-préfectures) ; qu'«en
l'absence des PV de dépouillement des votes », elle était « dans l'impossibilité
de proclamer les résultats dans » ces « circonscriptions (...) ». Dans le même
communiqué, la CEI annonce son intention de demander « au gouvernement d'ouvrir
une enquête à l'effet d'établir les responsabilités ».



 




29.
Je dois faire remarquer qu'en vertu de la Loi N° 2004-642 du 14 décembre
2004 modifiant la Loi N°2001-634 du 9 Octobre 2001 portant Composition,
Organisation, Attributions et Fonctionnement de la CEI, celle-ci procède à
« la collecte des procès-verbaux des opérations de vote et à la centralisation
des résultats 
» (Article 2 nouveau). La même loi dispose que « dans
l'exercice de ses attributions, la Commission Electorale Indépendante a accès à
toutes les sources d'information relatives au processus électoral (...)
. »
(Article 4 nouveau, alinéa 1).




 




30.           
Je suis d'avis qu'en vertu de son pouvoir de « contrôle de la régularité
du déroulement des opérations de vote, de dépouillement des bulletins de vote et
de recensement des suffrages » tel que défini par la loi du 14 décembre 2004, la
CEI dispose de moyens légaux pour recourir aux informations directes ou
indirectes détenues sur le résultat des votes dans ces circonscriptions, entre
autres, par les membres des bureaux de vote, les délégués des candidats à qui
devait être remis un exemplaire régulier du procès verbal de dépouillement des
votes. Je constate que la CEI n'a pas choisi jusqu'à maintenant de faire usage
de cette faculté importante que lui donne la loi.




 




31.
Pour ces circonscriptions, elle a indiqué dans la lettre de transmission
des résultats définitifs qu'elle m'a adressée le 08 mars 2012, qu'elle « se
prononcera, dès que les conditions permettent aux électeurs de ces deux
circonscriptions d'exprimer librement et dans la paix, leur suffrage. »



 




32.
L'ONUCI a déjà procédé à l'examen et à l'analyse des documents électoraux
en sa possession pour les besoins de la certification finale.




 




33.
Prenant acte du communiqué de la CEI, l'ONUCI réitère sa disponibilité à
s'associer aux investigations nécessaires et a pris attache avec le gouvernement
à cette fin. L'ONUCI espère que ces investigations seront conduites avec
célérité ; que leurs conclusions permettront d'établir la vérité et que toutes
les conséquences en seront tirées. Les enquêtes projetées devraient déboucher
sur  la proclamation des résultats ou sur la reprise des élections, conformément
à la pratique démocratique, dans un environnement sécurisé et apaisé.



 




34.
Conformément à son mandat, l'ONUCI est disposée à appuyer le gouvernement
et les institutions nationales dans la mise en œuvre de ces objectifs.